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Pierre Bergé, une vie haute couture

Sa vie était un roman. Elle a même nourri non pas un mais deux films sur son compagnon Yves Saint-Laurent. Pierre Bergé est mort ce vendredi à l’âge de 86 ans à Avignon où il était hospitalisé. Un destin romanesque, un personnage multiple à tel point que l’on ne sait pas par où commencer : intellectuel, chef d’entreprise, militant, mécène, dandy. Un peu tout ça à la fois au milieu d’une vie en grand pourtant entamée en tout petit sur l’île d’Oléron où il est né entre une mère institutrice et un pèrte fonctionnaire. Pas assez vaste pour lui même quand la famille s’installe à La Rochelle. Pierre Bergé rêve de Paris monte à la capitale, veut être journaliste devient marchand de livres en éditions originales. Un pied dans la culture qui lui permet de rencontrer les grands qui la font : Cocteau, Aragon, Camus, Buffet dont il devient le compagnon, Giono pour qui il travaille. 


Mais tout bascule en 1958, année où il croise la route d’ Yves Saint Laurent, jeune surdoué de la mode, styliste chez Dior. Pierre Bergé est amoureux et décide de gérer les affaires du petit génie. Vivre avec un tel artiste, c’est accepter les caprices, les doutes, les excès, les infidèlités. Saint Laurent se permet tout. Bergé gère tout. Yves crée, Pierre construit. Tous deux sont à la tête d’un empire qu’ils revendent à Sanofi en 1993 pour 3,6 milliards de francs à l’époque. En 2016, alors que le couturier est mort huit ans auparavant, sa fortune est même estimée à 180 millions d’euros. 

La grande gueule et le grand coeur


Homme d’affaires, homme de médias, co-actionnaire du groupe « La Vie - Le Monde »», patron du magasine gay « Têtu ». Mais aussi homme de convictions qui n’a pas la langue dans sa poche. En 2009, il atomise le Téléthon. « Cette émission parasite la générosité des Français de manière populiste. 100 millions d’euros pour le Téléthon, ça ne sert à rien », affirme-t-il avant d’être condamné pour diffamation. Atteint pourtant lui aussi de myopathie, il préfèrerait voir ces dons reverser à d’autres grandes causes, celle du Sida notamment, lui qui dès 1994 avait créé le Sidaction avec sa copine Line Renaud. 


Bergé mélange tout : la grande gueule et le grand coeur. Il n’hésite pas à s’insurger à la lecture d’ un éditorial contre la loi sur le mariage gay paru en 2013 dans « La Vie », qui fait pourtant partie du groupe de presse qu’il finance. « Oui, je serais heureux que ce journal ne fasse plus partie du groupe », affirme-t-il. «Si une bombe explose sur les Champs à cause de la Manif pour tous, c’est pas moi qui vais pleurer », tweete-t-il quelques semaines plus tard. Ambiance aussi avec la rédaction du « Monde » quand il traite publiquement un critique littéraire de « connard ». 


Colérique et passionné, grognon et généreux, cultivé et éclectique, Bergé évolue dans la mode, préside l’Opéra de Paris, est proche de Giscard puis se laisse séduire par Mitterrand, appelle à voter Chirac, croit en Hollande avant de soutenir Macron. Ces dernières années, sentant la fin approchée, il avait beaucoup vendu : sa collection d‘oeuvre d’arts qu’il possédait avec Yves Saint Laurent pour près de 373 millions d’euros, sa collection de livres il y a deux ans. Il s’était marié au printemps avec Madison Cox, 58 ans, paysagiste, jardinier des milliardaires qu’il connaissait depuis 40 ans, devenu vice président de la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint-Laurent. « Il va me succéder », disait-il il y a quelques semaines. Le roman est terminé. 

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Sa vie était un roman. Elle a même nourri non pas un mais deux films sur son compagnon Yves Saint-Laurent. Pierre Bergé est mort ce vendredi à l’âge de 86 ans à Avignon où il était hospitalisé. Un destin romanesque, un personnage multiple à tel point que l’on ne sait pas par où commencer : intellectuel, chef d’entreprise, militant, mécène, dandy. Un peu tout ça à la fois au milieu d’une vie en grand pourtant entamée en tout petit sur l’île d’Oléron où il est né entre une mère institutrice et un pèrte fonctionnaire. Pas assez vaste pour lui même quand la famille s’installe à La Rochelle. Pierre Bergé rêve de Paris monte à la capitale, veut être journaliste devient marchand de livres en éditions originales. Un pied dans la culture qui lui permet de rencontrer les grands qui la font : Cocteau, Aragon, Camus, Buffet dont il devient le compagnon, Giono pour qui il travaille. 


Mais tout bascule en 1958, année où il croise la route d’ Yves Saint Laurent, jeune surdoué de la mode, styliste chez Dior. Pierre Bergé est amoureux et décide de gérer les affaires du petit génie. Vivre avec un tel artiste, c’est accepter les caprices, les doutes, les excès, les infidèlités. Saint Laurent se permet tout. Bergé gère tout. Yves crée, Pierre construit. Tous deux sont à la tête d’un empire qu’ils revendent à Sanofi en 1993 pour 3,6 milliards de francs à l’époque. En 2016, alors que le couturier est mort huit ans auparavant, sa fortune est même estimée à 180 millions d’euros. 

La grande gueule et le grand coeur


Homme d’affaires, homme de médias, co-actionnaire du groupe « La Vie - Le Monde »», patron du magasine gay « Têtu ». Mais aussi homme de convictions qui n’a pas la langue dans sa poche. En 2009, il atomise le Téléthon. « Cette émission parasite la générosité des Français de manière populiste. 100 millions d’euros pour le Téléthon, ça ne sert à rien », affirme-t-il avant d’être condamné pour diffamation. Atteint pourtant lui aussi de myopathie, il préfèrerait voir ces dons reverser à d’autres grandes causes, celle du Sida notamment, lui qui dès 1994 avait créé le Sidaction avec sa copine Line Renaud. 


Bergé mélange tout : la grande gueule et le grand coeur. Il n’hésite pas à s’insurger à la lecture d’ un éditorial contre la loi sur le mariage gay paru en 2013 dans « La Vie », qui fait pourtant partie du groupe de presse qu’il finance. « Oui, je serais heureux que ce journal ne fasse plus partie du groupe », affirme-t-il. «Si une bombe explose sur les Champs à cause de la Manif pour tous, c’est pas moi qui vais pleurer », tweete-t-il quelques semaines plus tard. Ambiance aussi avec la rédaction du « Monde » quand il traite publiquement un critique littéraire de « connard ». 


Colérique et passionné, grognon et généreux, cultivé et éclectique, Bergé évolue dans la mode, préside l’Opéra de Paris, est proche de Giscard puis se laisse séduire par Mitterrand, appelle à voter Chirac, croit en Hollande avant de soutenir Macron. Ces dernières années, sentant la fin approchée, il avait beaucoup vendu : sa collection d‘oeuvre d’arts qu’il possédait avec Yves Saint Laurent pour près de 373 millions d’euros, sa collection de livres il y a deux ans. Il s’était marié au printemps avec Madison Cox, 58 ans, paysagiste, jardinier des milliardaires qu’il connaissait depuis 40 ans, devenu vice président de la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint-Laurent. « Il va me succéder », disait-il il y a quelques semaines. Le roman est terminé. 

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