Ce matin, un homme fait la Une des journaux : Harvey Weinstein.
"Le roi déchu d’Hollywood", titre le Figaro. "Un ogre des temps modernes", écrit Isabelle Hanne dans Libération, "un prédateur qui ne reculait devant aucune proie, protégé par les dollars et la loi du silence".
Un ogre donc, un prédateur. "C’était un gros porc et tout le monde le savait, raconte un journaliste américain à Libé, j’avais entendu des histoires de viols mais on considérait que c’était le prix et la loi du business".
Voilà. Ce qui est bien c’est qu’on savait : "Tout le monde était au courant", dit Paris Match. "Tout le monde savait", répète Le Parisien qui parle d’une "triste réalité" et publie ce dessin bien rance d’une rencontre entre Weinstein et DSK, le second demandant au premier "je peux avoir un autographe ? Vous êtes mon idole".
Tout le monde savait. Dans son édito, le Los Angeles Times confirme : "son comportement était bien connu à l’intérieur de l’entreprise et dans le tout-Hollywood, il était toléré, couvert et permis".
Le L.A. Times, journal américain qui compte sans doute le plus grand nombre de reporters chargés d’enquêter quotidiennement sur l’industrie cinématographique, devait lui aussi savoir.
On savait tellement qu’on en faisait des bons mots en pleine cérémonie des Oscars. Le site Slate.fr rappelle notamment cette blague grinçante du réalisateur Seth Mac Farlane en 2013. Présentant les actrices nominées, il a conclu en lançant : "félicitations mesdames, avec ça, vous cinq n’avez plus à prétendre que vous êtes attirées par Harvey Weinstein".
Dans la salle, tout le monde a ri, à gorge déployée.
En dernière page de l’Humanité, le dessin de Jul résume assez bien le pourquoi de la loi du silence. Deux touristes se tiennent devant les grandes lettres blanches du Hollywood sign devenu Viollywood.
Sauf qu’Hollywood "n’a pas le monopole du harcèlement sexuel".
C’est le titre de l’édito de Maurice Bontinck dans la Charente Libre : "hier soir sur France 2, dit-il, la parole a explosé aux visages des téléspectateurs grâce au documentaire « harcèlement sexuel au travail, l’affaire de tous". "À chaque fois l’engrenage est le même, écrit-il, l’agression, voilée en séduction, de la part d’un harceleur renforcé par le mutisme des collègues. le système est connu".
"C’est vrai à Hollywood, mais c’est vrai aussi dans l’armée, ajoute Pascal Coquis dans les Dernières Nouvelles d’Alsace, c’est vrai en politique, au travail, dans la vie quotidienne, c’est vrai partout. Il est temps, dit-il que la honte change de camp".
À voir quelques Une de la presse locale, on se dit qu’il est plus que temps. Celle du Maine Libre, par exemple, qui titre "Louise, 22 ans, tuée par un voisin violeur". Le journal précise que le voisin était déjà "connu pour des faits de viols".
En première page de l’Union de Reims : "un viticulteur a été condamné à 10 ans de réclusion pour avoir violé son ex-compagne. Il n’avait pas supporté qu’elle l’ait quitté". Précision nauséabonde qui, comme souvent, laisse entendre qu’il y avait bien une raison, que le crime n’a pas été commis sur un coup de tête.
Dans l’Est Républicain, ce n’est pas une rupture, mais "le pull noir moulant en angora d’une patiente" qui aurait amené le gynécologue Michel Musquar, à la violer. Devant les assises de Moselle, l’homme accusé de viol sur cinq patientes, assure que c’est ce pull qui l’a fait "déraper en fin de prélèvement"
Un accusé dont la ligne de défense est la spécificité de sa méthode médicale, "un protocole de prélèvement, dit-il, à l’américaine".
En France, c’est une autre révélation qui fait tomber un mythe du cinéma français : "la face noire de Michel Audiard".
Vous ne citerez peut être plus les Tontons Flingueurs avec le même allant. Parce que derrière l’expression utilisée par l’Obs, "face noire de Michel Audiard", il faut comprendre "l’antisémitisme de Michel Audiard".
Pour le prouver, l’hebdo détaille les archives exhumées par le rédacteur en chef de la revue de littérature policière "Temps Noir", Franck Lhomeau, en l’occurrence des articles écrits par Audiard, pendant l’occupation, dans la presse collaborationniste. Les extraits laissent peu de doute, comme cette nouvelle publiée en 43 qui met en scène le personnage d’Ephraïm décrit comme "une synthèse de fourberie", Audiard écrit : "la conjuration des synagogues s’achèvera le jour de votre pendaison, manifestation de l’immanente justice". Autre texte en 44 : "le monde qu’il est convenu d’appeler artistique demeure le plus coquet ramassis de faisans, juifs, pardonnez le pléonasme, écrit-il, métèques et margoulins".
Il y a aussi Joseph Kessel, qualifié de "petit youpin" et puis cette fiche d’adhésion au groupe Collaboration, fondé en 1940… (…) Qu’il ait pu écrire pour un journal qui demandait à ses lecteurs, "faut-il exterminer les juifs » est odieux, écrit l’Obs, qu’il se soit laissé gagner par l’antisémitisme de l’époque est simplement indigne. Il y a chez Audiard un côté anar de droite tendance Céline, conclu le journaliste François Forestier, qui précise, on le savait depuis longtemps".
Dans la presse également, d’autres révélations, bien moins nauséabondes, en politique cette fois.
Oui, des révélations ou des choses que l’on soupçonnait déjà.
"Le gouvernement cherche une voix de gauche", nous apprend Le Monde qui relate cette confidence d’un proche d’Emmanuel Macron, "le président aurait invité ses ministres à aller là où ça souffre" pour ne pas donner l’impression de ne parler qu’à la France qui va bien". Curieuse manière de dire que « la France qui va bien serait de droite, et "là où ça souffre", c’est de gauche.
Et puis il y a aussi cet aveu de Jean-François Copé dans le Parisien. "la réalité politique, affirme l’ancien président de l’UMP, c’est qu’on a un président de la République qui mène une politique de droite et qui fait tout ce que nous n’avons pas eu le courage de faire sur le plan économique quand on était au pouvoir. Ayons la cohérence de le reconnaitre, lance Jean-François Copé". Manière de dire, encore une fois, qu’on sait tout ça depuis un bout de temps…
Enfin, puisqu’on a commencé cette revue de presse aux États-Unis, retournons-y avec cette enquête surprenante d’Hélène Vissière dans Le Point sur la nouvelle vie de George W. Bush. "L’ancien président s’est reconverti dans la peinture", écrit le Point, surprise : les critiques de gauche adorent ! Le New York Times valide : "si son portrait de monsieur Poutine était une toile anonyme dans une brocante, écrit le quotidien, la plupart d’entre nous serions ravis de l’acquérir".
Serait-il meilleur peintre que président ? se demande la journaliste. Vue les toiles qui sont publiées, ni l’un ni l’autre.
Ce matin, un homme fait la Une des journaux : Harvey Weinstein.
"Le roi déchu d’Hollywood", titre le Figaro. "Un ogre des temps modernes", écrit Isabelle Hanne dans Libération, "un prédateur qui ne reculait devant aucune proie, protégé par les dollars et la loi du silence".
Un ogre donc, un prédateur. "C’était un gros porc et tout le monde le savait, raconte un journaliste américain à Libé, j’avais entendu des histoires de viols mais on considérait que c’était le prix et la loi du business".
Voilà. Ce qui est bien c’est qu’on savait : "Tout le monde était au courant", dit Paris Match. "Tout le monde savait", répète Le Parisien qui parle d’une "triste réalité" et publie ce dessin bien rance d’une rencontre entre Weinstein et DSK, le second demandant au premier "je peux avoir un autographe ? Vous êtes mon idole".
Tout le monde savait. Dans son édito, le Los Angeles Times confirme : "son comportement était bien connu à l’intérieur de l’entreprise et dans le tout-Hollywood, il était toléré, couvert et permis".
Le L.A. Times, journal américain qui compte sans doute le plus grand nombre de reporters chargés d’enquêter quotidiennement sur l’industrie cinématographique, devait lui aussi savoir.
On savait tellement qu’on en faisait des bons mots en pleine cérémonie des Oscars. Le site Slate.fr rappelle notamment cette blague grinçante du réalisateur Seth Mac Farlane en 2013. Présentant les actrices nominées, il a conclu en lançant : "félicitations mesdames, avec ça, vous cinq n’avez plus à prétendre que vous êtes attirées par Harvey Weinstein".
Dans la salle, tout le monde a ri, à gorge déployée.
En dernière page de l’Humanité, le dessin de Jul résume assez bien le pourquoi de la loi du silence. Deux touristes se tiennent devant les grandes lettres blanches du Hollywood sign devenu Viollywood.
Sauf qu’Hollywood "n’a pas le monopole du harcèlement sexuel".
C’est le titre de l’édito de Maurice Bontinck dans la Charente Libre : "hier soir sur France 2, dit-il, la parole a explosé aux visages des téléspectateurs grâce au documentaire « harcèlement sexuel au travail, l’affaire de tous". "À chaque fois l’engrenage est le même, écrit-il, l’agression, voilée en séduction, de la part d’un harceleur renforcé par le mutisme des collègues. le système est connu".
"C’est vrai à Hollywood, mais c’est vrai aussi dans l’armée, ajoute Pascal Coquis dans les Dernières Nouvelles d’Alsace, c’est vrai en politique, au travail, dans la vie quotidienne, c’est vrai partout. Il est temps, dit-il que la honte change de camp".
À voir quelques Une de la presse locale, on se dit qu’il est plus que temps. Celle du Maine Libre, par exemple, qui titre "Louise, 22 ans, tuée par un voisin violeur". Le journal précise que le voisin était déjà "connu pour des faits de viols".
En première page de l’Union de Reims : "un viticulteur a été condamné à 10 ans de réclusion pour avoir violé son ex-compagne. Il n’avait pas supporté qu’elle l’ait quitté". Précision nauséabonde qui, comme souvent, laisse entendre qu’il y avait bien une raison, que le crime n’a pas été commis sur un coup de tête.
Dans l’Est Républicain, ce n’est pas une rupture, mais "le pull noir moulant en angora d’une patiente" qui aurait amené le gynécologue Michel Musquar, à la violer. Devant les assises de Moselle, l’homme accusé de viol sur cinq patientes, assure que c’est ce pull qui l’a fait "déraper en fin de prélèvement"
Un accusé dont la ligne de défense est la spécificité de sa méthode médicale, "un protocole de prélèvement, dit-il, à l’américaine".
En France, c’est une autre révélation qui fait tomber un mythe du cinéma français : "la face noire de Michel Audiard".
Vous ne citerez peut être plus les Tontons Flingueurs avec le même allant. Parce que derrière l’expression utilisée par l’Obs, "face noire de Michel Audiard", il faut comprendre "l’antisémitisme de Michel Audiard".
Pour le prouver, l’hebdo détaille les archives exhumées par le rédacteur en chef de la revue de littérature policière "Temps Noir", Franck Lhomeau, en l’occurrence des articles écrits par Audiard, pendant l’occupation, dans la presse collaborationniste. Les extraits laissent peu de doute, comme cette nouvelle publiée en 43 qui met en scène le personnage d’Ephraïm décrit comme "une synthèse de fourberie", Audiard écrit : "la conjuration des synagogues s’achèvera le jour de votre pendaison, manifestation de l’immanente justice". Autre texte en 44 : "le monde qu’il est convenu d’appeler artistique demeure le plus coquet ramassis de faisans, juifs, pardonnez le pléonasme, écrit-il, métèques et margoulins".
Il y a aussi Joseph Kessel, qualifié de "petit youpin" et puis cette fiche d’adhésion au groupe Collaboration, fondé en 1940… (…) Qu’il ait pu écrire pour un journal qui demandait à ses lecteurs, "faut-il exterminer les juifs » est odieux, écrit l’Obs, qu’il se soit laissé gagner par l’antisémitisme de l’époque est simplement indigne. Il y a chez Audiard un côté anar de droite tendance Céline, conclu le journaliste François Forestier, qui précise, on le savait depuis longtemps".
Dans la presse également, d’autres révélations, bien moins nauséabondes, en politique cette fois.
Oui, des révélations ou des choses que l’on soupçonnait déjà.
"Le gouvernement cherche une voix de gauche", nous apprend Le Monde qui relate cette confidence d’un proche d’Emmanuel Macron, "le président aurait invité ses ministres à aller là où ça souffre" pour ne pas donner l’impression de ne parler qu’à la France qui va bien". Curieuse manière de dire que « la France qui va bien serait de droite, et "là où ça souffre", c’est de gauche.
Et puis il y a aussi cet aveu de Jean-François Copé dans le Parisien. "la réalité politique, affirme l’ancien président de l’UMP, c’est qu’on a un président de la République qui mène une politique de droite et qui fait tout ce que nous n’avons pas eu le courage de faire sur le plan économique quand on était au pouvoir. Ayons la cohérence de le reconnaitre, lance Jean-François Copé". Manière de dire, encore une fois, qu’on sait tout ça depuis un bout de temps…
Enfin, puisqu’on a commencé cette revue de presse aux États-Unis, retournons-y avec cette enquête surprenante d’Hélène Vissière dans Le Point sur la nouvelle vie de George W. Bush. "L’ancien président s’est reconverti dans la peinture", écrit le Point, surprise : les critiques de gauche adorent ! Le New York Times valide : "si son portrait de monsieur Poutine était une toile anonyme dans une brocante, écrit le quotidien, la plupart d’entre nous serions ravis de l’acquérir".
Serait-il meilleur peintre que président ? se demande la journaliste. Vue les toiles qui sont publiées, ni l’un ni l’autre.
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