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Pieces of a Woman : critique éparpillée façon puzzle sur Netflix - ÉcranLarge.com

LA MORT, SA VIE, SON OEUVRE 

De nombreux cinéphiles ont découvert le travail de Kornél Mundruczó à l’occasion de White God puis La Lune de Jupiter, deux de ses films les plus acclamés sur la Croisette, mais aussi les plus aimables, voire épiques, dans leur désir de renouveler certains codes fictionnels traditionnellement usités (voire usiné) par le cinéma anglo-saxon. Avec Pieces of Woman, acquis par Netflix après la présentation du film à Venise en septembre 2020, le réalisateur renoue – en apparence - avec une veine beaucoup plus intimiste, celle de Johanna et d'Un garçon fragile - Le projet Frankenstein. 

Depuis ses premiers longs-métrages, et jusqu’aux surnaturelles scènes de vol de son précédent effort, le cinéma de Mundruczó est une affaire de dynamique des fluides, du comportement d’un vecteur, sur lequel son environnement exerce une pression intolérable, et de la réponse qui en jaillit pour le recomposer. C’est précisément ce dont il est question ici, alors que nous suivons Martha (Vanessa Kirby), dont l’enfant est mort-né à l’issue d’un accouchement à domicile qui tourne au cauchemar. 

photo, Vanessa Kirby, Molly ParkerUn plan séquence ahurissant de plus de dix minutes

Alors qu’elle tente de faire son deuil, il lui faut encore supporter la pression d’une mère dominatrice qui entend lui dicter la marche à suivre, notamment sur le plan judiciaire. De l'autre, son époux, prisonnier de sa propre médiocrité et terrifié à l’idée de tourner la page, voudrait lui interdire d’avancer, quitte à systématiquement détruire ce qu'ils ont bâti. C’est pourtant précisément ce que fait Martha, l’unique geste qu’elle est encore capable d’accomplir. Se mouvoir. Ne pas s’arrêter. 

 

Photo Shia LaBeouf, Vanessa KirbyUn couple au bord de l'implosion

KIRBY’S ADVENTURE  

Et c’est justement ce que capte, souvent avec une acuité stupéfiante, la caméra de Mundruczó : des personnages en mouvement, dont les élans, pour inconscients qu’ils soient parfois, sont autant d’appels à l’aide ou de déclarations d’indépendance. Simultanément libre et enchâssée aux protagonistes, elle surprend par l’aisance avec laquelle elle laisse l’action se décadrer, pour soudain retrouver un sens de l’harmonie évident, articuler les différents plans de l’image pour mieux rendre compte du chaos qui s’abat sur Martha et les siens. 

Particulièrement à l’aise avec le dispositif viscéral déployé par le cinéaste, Vanessa Kirby habite le film avec une grâce rude, une énergie vitale tantôt mal-aimable puis inextinguible, qui permet à Pieces of Woman de déployer un discours sensible et plus politique qu’il n’y paraît. Plus que la bouleversante chronique d’un deuil, c’est un récit d’émancipation qui se dessine, celui d’une femme dont la pulsion de (sur)vie nécessite qu’elle s’affranchisse d’une norme bourgeoise, sociale, morale, judiciaire, pour pouvoir exister. 

photo, Ellen BurstynLa mère à boire

Le métrage capture ce mouvement avec toute la puissance, iconographique, charnelle qu’on connaît aux travaux de Mundruczó. On pourra regretter que dans le premier tiers du récit, le plus physiquement éprouvant et le plus démonstratif, l’artiste paraisse presque en concurrence avec son sujet.

À la faveur d’un plan-séquence virtuose et de quelques effets faciles, il prend le risque d’écraser son propre discours, son héroïne. Une brutalité qui menace un temps, jusqu’à ce qu’il confie, ainsi que le fait Martha, l’intrigue à une énergie plus éclatante et vitale. Jusqu’à nous laisser, à la faveur d’un plan final qui renoue avec la poésie élégiaque de Delta, les yeux grands ouverts et le cœur palpitant.

Pieces of a Woman est disponible sur Netflix depuis le 7 janvier en France

affiche française

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LA MORT, SA VIE, SON OEUVRE 

De nombreux cinéphiles ont découvert le travail de Kornél Mundruczó à l’occasion de White God puis La Lune de Jupiter, deux de ses films les plus acclamés sur la Croisette, mais aussi les plus aimables, voire épiques, dans leur désir de renouveler certains codes fictionnels traditionnellement usités (voire usiné) par le cinéma anglo-saxon. Avec Pieces of Woman, acquis par Netflix après la présentation du film à Venise en septembre 2020, le réalisateur renoue – en apparence - avec une veine beaucoup plus intimiste, celle de Johanna et d'Un garçon fragile - Le projet Frankenstein. 

Depuis ses premiers longs-métrages, et jusqu’aux surnaturelles scènes de vol de son précédent effort, le cinéma de Mundruczó est une affaire de dynamique des fluides, du comportement d’un vecteur, sur lequel son environnement exerce une pression intolérable, et de la réponse qui en jaillit pour le recomposer. C’est précisément ce dont il est question ici, alors que nous suivons Martha (Vanessa Kirby), dont l’enfant est mort-né à l’issue d’un accouchement à domicile qui tourne au cauchemar. 

photo, Vanessa Kirby, Molly ParkerUn plan séquence ahurissant de plus de dix minutes

Alors qu’elle tente de faire son deuil, il lui faut encore supporter la pression d’une mère dominatrice qui entend lui dicter la marche à suivre, notamment sur le plan judiciaire. De l'autre, son époux, prisonnier de sa propre médiocrité et terrifié à l’idée de tourner la page, voudrait lui interdire d’avancer, quitte à systématiquement détruire ce qu'ils ont bâti. C’est pourtant précisément ce que fait Martha, l’unique geste qu’elle est encore capable d’accomplir. Se mouvoir. Ne pas s’arrêter. 

 

Photo Shia LaBeouf, Vanessa KirbyUn couple au bord de l'implosion

KIRBY’S ADVENTURE  

Et c’est justement ce que capte, souvent avec une acuité stupéfiante, la caméra de Mundruczó : des personnages en mouvement, dont les élans, pour inconscients qu’ils soient parfois, sont autant d’appels à l’aide ou de déclarations d’indépendance. Simultanément libre et enchâssée aux protagonistes, elle surprend par l’aisance avec laquelle elle laisse l’action se décadrer, pour soudain retrouver un sens de l’harmonie évident, articuler les différents plans de l’image pour mieux rendre compte du chaos qui s’abat sur Martha et les siens. 

Particulièrement à l’aise avec le dispositif viscéral déployé par le cinéaste, Vanessa Kirby habite le film avec une grâce rude, une énergie vitale tantôt mal-aimable puis inextinguible, qui permet à Pieces of Woman de déployer un discours sensible et plus politique qu’il n’y paraît. Plus que la bouleversante chronique d’un deuil, c’est un récit d’émancipation qui se dessine, celui d’une femme dont la pulsion de (sur)vie nécessite qu’elle s’affranchisse d’une norme bourgeoise, sociale, morale, judiciaire, pour pouvoir exister. 

photo, Ellen BurstynLa mère à boire

Le métrage capture ce mouvement avec toute la puissance, iconographique, charnelle qu’on connaît aux travaux de Mundruczó. On pourra regretter que dans le premier tiers du récit, le plus physiquement éprouvant et le plus démonstratif, l’artiste paraisse presque en concurrence avec son sujet.

À la faveur d’un plan-séquence virtuose et de quelques effets faciles, il prend le risque d’écraser son propre discours, son héroïne. Une brutalité qui menace un temps, jusqu’à ce qu’il confie, ainsi que le fait Martha, l’intrigue à une énergie plus éclatante et vitale. Jusqu’à nous laisser, à la faveur d’un plan final qui renoue avec la poésie élégiaque de Delta, les yeux grands ouverts et le cœur palpitant.

Pieces of a Woman est disponible sur Netflix depuis le 7 janvier en France

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