L’écrivain, haut fonctionnaire et psychanalyste Michel Schneider est mort, le jeudi 21 juillet à Villejuif (Val-de-Marne), des suites d’un cancer. Il était âgé de 78 ans. Né le 28 mai 1944 à Dammarie-les-Lys, en Seine-et-Marne, dans une famille d’origine alsacienne, il avait fait des études à l’Institut d’études politiques de Paris, puis à l’ENA (promotion Thomas More). Lors des quelques années qui suivent 1968, il penche pour l’extrême gauche maoïste, tendance lacanienne.
En 1971, sortant de l’ENA, il commence sa carrière à la sous-direction des prévisions financières, au ministère de l’économie et des finances, avant de devenir, dix ans plus tard, conseiller référendaire à la Cour des comptes, jusqu’à sa retraite en 2009. Mais le moment le plus saillant, le plus visible de sa carrière dans la fonction publique commence en octobre 1988, quand il entre au ministère de la culture comme directeur de la musique et de la danse. De ce poste, en pleine ère mitterrandienne, avec Michel Rocard à Matignon, il démissionne en mai 1991, et regagne la Cour des comptes.
De ces trois courtes années d’expérience Rue de Valois, il tirera un livre violemment critique, mais sans rancœur personnelle, contre les choix et les financements de la politique culturelle française : La Comédie de la culture (Seuil, 1993). Michel Schneider s’en prend à Jack Lang, alors ministre de la culture, qui, soutient-il, distribue les subsides, sans forcément favoriser une réelle démocratisation de la culture. « Rien n’est pire qu’un prince qui se prend pour un artiste », pointe-t-il, et aussi le rôle de ces artistes courtisans qui considèrent comme parfaitement naturel leur financement généreux par l’Etat. Ce qui domine, selon lui, c’est une logique publicitaire et l’obsession de multiplier l’offre culturelle, sans tenir compte de la demande diversifiée des publics.
L’une de ses principales cibles est alors le compositeur Pierre Boulez (1925-2016), fondateur et directeur de l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique, qui bénéficie de larges subventions, au détriment évident d’autres créateurs. « La musique “ircamienne”, qui prétend être toute la musique contemporaine, c’est l’ordinateur plus la subvention », grince-t-il. C’est bien à partir d’un point de vue « de gauche » que Schneider dresse un bilan en forme de réquisitoire contre « une politique culturelle spectaculaire et dispersée, volontariste et coûteuse, dispendieuse même en certains domaines ». En février 1993, une émission mémorable de Bernard Pivot, « Bouillon de culture », verra s’affronter, d’une manière spectaculaire, Michel Schneider, Jack Lang et (surtout) Pierre Boulez.
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En 1971, sortant de l’ENA, il commence sa carrière à la sous-direction des prévisions financières, au ministère de l’économie et des finances, avant de devenir, dix ans plus tard, conseiller référendaire à la Cour des comptes, jusqu’à sa retraite en 2009. Mais le moment le plus saillant, le plus visible de sa carrière dans la fonction publique commence en octobre 1988, quand il entre au ministère de la culture comme directeur de la musique et de la danse. De ce poste, en pleine ère mitterrandienne, avec Michel Rocard à Matignon, il démissionne en mai 1991, et regagne la Cour des comptes.
De ces trois courtes années d’expérience Rue de Valois, il tirera un livre violemment critique, mais sans rancœur personnelle, contre les choix et les financements de la politique culturelle française : La Comédie de la culture (Seuil, 1993). Michel Schneider s’en prend à Jack Lang, alors ministre de la culture, qui, soutient-il, distribue les subsides, sans forcément favoriser une réelle démocratisation de la culture. « Rien n’est pire qu’un prince qui se prend pour un artiste », pointe-t-il, et aussi le rôle de ces artistes courtisans qui considèrent comme parfaitement naturel leur financement généreux par l’Etat. Ce qui domine, selon lui, c’est une logique publicitaire et l’obsession de multiplier l’offre culturelle, sans tenir compte de la demande diversifiée des publics.
L’une de ses principales cibles est alors le compositeur Pierre Boulez (1925-2016), fondateur et directeur de l’Institut de recherche et coordination acoustique/musique, qui bénéficie de larges subventions, au détriment évident d’autres créateurs. « La musique “ircamienne”, qui prétend être toute la musique contemporaine, c’est l’ordinateur plus la subvention », grince-t-il. C’est bien à partir d’un point de vue « de gauche » que Schneider dresse un bilan en forme de réquisitoire contre « une politique culturelle spectaculaire et dispersée, volontariste et coûteuse, dispendieuse même en certains domaines ». En février 1993, une émission mémorable de Bernard Pivot, « Bouillon de culture », verra s’affronter, d’une manière spectaculaire, Michel Schneider, Jack Lang et (surtout) Pierre Boulez.
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