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«Narcissique», «sectaire», «dans le déni»... La culture est inoffensive face au RN selon Ariane Mnouchkine et Éric Ruf - Le Figaro

Dans une tribune publiée par Libération, la fondatrice du Théâtre du Soleil dénonce la responsabilité des artistes dans la montée l’extrême droite. Un constat d’impuissance partagé par Éric Ruf dans Le Monde.

«Qu'est-ce qu'on n'a pas fait ? Ou fait que nous n'aurions pas dû faire ? On pensait qu'on avait trois ans pour y réfléchir et soudain, ce geste du président de la République (...) et nous n’avons plus que trois semaines». Après la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron dans la stupeur générale le 9 juin, Ariane Mnouchkine, la créatrice du Théâtre du Soleil, s’est interrogée dans Libération sur la responsabilité des artistes par rapport à la montée de l’extrême droite en France. Son verdict est sans appel. Et sans aucune mansuétude pour le monde de la culture qu’elle juge narcissique.

Sa peur de l’arrivée au pouvoir du parti à la flamme date de 2002, «quand, pour la première fois, le FN est arrivé au second tour de l’élection présidentielle», précise-t-elle dans sa tribune du 12 juin. La potentielle victoire du Rassemblement national aux élections législatives du 30 juin et du 7 juillet serait sa «hantise». Le cri d’avertissement de l’artiste de 85 ans s’adresse notamment aux artistes de l’Hexagone. «Oui, nous allons nous trouver très vite, immédiatement peut-être, devant un dilemme moral : que ferons-nous lorsque nous aurons un ministère de la Culture RN, un ministère de l'Éducation nationale RN, un ministère de la Santé RN ? Un ministère de l'Intérieur RN ? Je ne parle pas de l'incompétence probable, que je mets à part. Je parle du moment où nous risquons de devenir des collaborateurs», s’alarme-t-elle encore. Avant d’ajouter : «Quand décide-t-on de fermer le (Cirque du) Soleil ? Au contraire, va-t-on se raconter qu’on résiste de l’intérieur Elle qualifie ces futures institutions ministérielles de «loups» qui joueront les «renards», qui chercheront à gâter, flatter ou financer les mondes de l’art. «Je ne veux pas être un personnage de la pièce que nous avons joué en 1979, Mephisto, d'après Klaus Mann », affirme-t-elle dans la tribune.

«Narcissisme» et «sectarisme»

Pour Ariane Mnouchkine, les premiers «responsables», ce sont justement les «gens de culture». «On a lâché le peuple, on n'a pas voulu écouter les peurs, les angoisses. Quand les gens disaient ce qu'ils voyaient, on leur disait qu'ils se trompaient, qu'ils ne voyaient pas ce qu'ils voyaient», déplore-t-elle dans Libération. D’après elle, même si les artistes se mobilisaient aujourd’hui contre le parti de Jordan Bardella, il serait trop tard. «Je ne suis pas certaine qu'une prise de parole collective des artistes soit utile ou productive», analyse-t-elle encore. En effet, Ariane Mnouchkine considère que ses «concitoyens en ont marre» des gens de culture, de leur «impuissance», de leurs «peurs», de leur «narcissisme», de leur «sectarisme» et de leurs «dénis». Une réflexion «sombre» que l’auteure de la tribune assume avant de faire appel à la bienveillance du «public» et de sa «troupe».

Le constat d’Ariane Mnouchkine est partagé par Éric Ruf, dans un entretien accordé au Monde le 16 juin. Et la même interrogation court sur les lèvres de l’actuel administrateur de la Comédie-Française : «Cela fait longtemps que Tiago Rodrigues, moi et beaucoup d'autres faisons ce cauchemar, longtemps que l'on se demande : le jour où le RN passe, qu'est-ce que je fais ?», a-t-il confié au Monde.

La vision d’Éric Ruf sur le secteur du spectacle vivant s’apparente à celle d’Ariane Mnouchkine : «La culture n'a plus aucun poids dans le débat politique, affirme-t-il auprès du Monde. Un doute fondamental s'est installé, chez les politiques, et conséquemment dans les médias et dans la société, sur son utilité, un doute qui touche spécifiquement le théâtre. À quoi ça sert, la Comédie-Française, ses quatre cents salariés, ses quatre-vingts métiers, son expertise ?»

À moins de deux semaines du premier tour des élections législatives, face à ce constat d’«impuissance» dans le débat politique, les syndicats de la culture appellent, eux, à la mobilisation «contre l'extrême droite».

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Dans une tribune publiée par Libération, la fondatrice du Théâtre du Soleil dénonce la responsabilité des artistes dans la montée l’extrême droite. Un constat d’impuissance partagé par Éric Ruf dans Le Monde.

«Qu'est-ce qu'on n'a pas fait ? Ou fait que nous n'aurions pas dû faire ? On pensait qu'on avait trois ans pour y réfléchir et soudain, ce geste du président de la République (...) et nous n’avons plus que trois semaines». Après la dissolution de l’Assemblée nationale décidée par Emmanuel Macron dans la stupeur générale le 9 juin, Ariane Mnouchkine, la créatrice du Théâtre du Soleil, s’est interrogée dans Libération sur la responsabilité des artistes par rapport à la montée de l’extrême droite en France. Son verdict est sans appel. Et sans aucune mansuétude pour le monde de la culture qu’elle juge narcissique.

Sa peur de l’arrivée au pouvoir du parti à la flamme date de 2002, «quand, pour la première fois, le FN est arrivé au second tour de l’élection présidentielle», précise-t-elle dans sa tribune du 12 juin. La potentielle victoire du Rassemblement national aux élections législatives du 30 juin et du 7 juillet serait sa «hantise». Le cri d’avertissement de l’artiste de 85 ans s’adresse notamment aux artistes de l’Hexagone. «Oui, nous allons nous trouver très vite, immédiatement peut-être, devant un dilemme moral : que ferons-nous lorsque nous aurons un ministère de la Culture RN, un ministère de l'Éducation nationale RN, un ministère de la Santé RN ? Un ministère de l'Intérieur RN ? Je ne parle pas de l'incompétence probable, que je mets à part. Je parle du moment où nous risquons de devenir des collaborateurs», s’alarme-t-elle encore. Avant d’ajouter : «Quand décide-t-on de fermer le (Cirque du) Soleil ? Au contraire, va-t-on se raconter qu’on résiste de l’intérieur Elle qualifie ces futures institutions ministérielles de «loups» qui joueront les «renards», qui chercheront à gâter, flatter ou financer les mondes de l’art. «Je ne veux pas être un personnage de la pièce que nous avons joué en 1979, Mephisto, d'après Klaus Mann », affirme-t-elle dans la tribune.

«Narcissisme» et «sectarisme»

Pour Ariane Mnouchkine, les premiers «responsables», ce sont justement les «gens de culture». «On a lâché le peuple, on n'a pas voulu écouter les peurs, les angoisses. Quand les gens disaient ce qu'ils voyaient, on leur disait qu'ils se trompaient, qu'ils ne voyaient pas ce qu'ils voyaient», déplore-t-elle dans Libération. D’après elle, même si les artistes se mobilisaient aujourd’hui contre le parti de Jordan Bardella, il serait trop tard. «Je ne suis pas certaine qu'une prise de parole collective des artistes soit utile ou productive», analyse-t-elle encore. En effet, Ariane Mnouchkine considère que ses «concitoyens en ont marre» des gens de culture, de leur «impuissance», de leurs «peurs», de leur «narcissisme», de leur «sectarisme» et de leurs «dénis». Une réflexion «sombre» que l’auteure de la tribune assume avant de faire appel à la bienveillance du «public» et de sa «troupe».

Le constat d’Ariane Mnouchkine est partagé par Éric Ruf, dans un entretien accordé au Monde le 16 juin. Et la même interrogation court sur les lèvres de l’actuel administrateur de la Comédie-Française : «Cela fait longtemps que Tiago Rodrigues, moi et beaucoup d'autres faisons ce cauchemar, longtemps que l'on se demande : le jour où le RN passe, qu'est-ce que je fais ?», a-t-il confié au Monde.

La vision d’Éric Ruf sur le secteur du spectacle vivant s’apparente à celle d’Ariane Mnouchkine : «La culture n'a plus aucun poids dans le débat politique, affirme-t-il auprès du Monde. Un doute fondamental s'est installé, chez les politiques, et conséquemment dans les médias et dans la société, sur son utilité, un doute qui touche spécifiquement le théâtre. À quoi ça sert, la Comédie-Française, ses quatre cents salariés, ses quatre-vingts métiers, son expertise ?»

À moins de deux semaines du premier tour des élections législatives, face à ce constat d’«impuissance» dans le débat politique, les syndicats de la culture appellent, eux, à la mobilisation «contre l'extrême droite».

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