Dix ans après la signature de l'accord intergouvernemental entre les Emirats Arabes Unis et la France, le Louvre Abu Dhabi qui se définit comme le premier musée universel du monde arabe sera inauguré ce mercredi à 20h00, en présence d'Emmanuel Macron, de l'homme fort des Emirats Arabes Unis Mohammed ben Zayed Al-Nahyane ainsi que d'autres dirigeants, dont le roi Mohammed VI du Maroc. L'ouverture au grand public est programmée ce samedi 11 novembre, suivie de trois jours de festivités avec des concerts et des spectacles par des artistes du monde entier. Situé sur l'île de Saadiyat où sont attendus le Guggenheim et le Zayed National Museum, ce musée de sable et de lumière conçu par l'architecte français Jean Nouvel a pour vocation de "s'ouvrir aux autres", comme l'a souligné le 7 novembre en conférence de presse Jean-Luc Martinez, président du Louvre à Paris. Diplômé de l'institut d'études politiques de Paris et d'HEC, Manuel Rabaté a été nommé directeur du Musée du Louvre Abu Dhabi en 2016. Pour Challenges, il revient sur le fonctionnement complexe de cette structure émirienne qui permet à la France de rayonner de par son expertise.
Comment fonctionne administrativement le Musée du Louvre Abu Dhabi?
Le Musée du Louvre Abu Dhabi est un musée émirien, donc une structure rattachée au département de la culture et du tourisme, qui est l’équivalent d’un ministère en France. S’il porte un nom qui le rattache à la France, la structure de ce musée est bien émirienne. Aujourd’hui, on a un partenaire français – L’Agence France – Muséums – qui a été créée par l’accord intergouvernemental signé le 6 mars 2007 entre les Émirats Arabes Unis et la France pour mobiliser les musées français. Elle compte une quarantaine d’employés. Du côté émirien, nous sommes une équipe de soixante personnes, dont moi. En tout, le Louvre Abu Dhabi mobilise une centaine d’employés, de toutes nationalités.
Pouvez-vous préciser les termes de l’accord intergouvernemental conclu en 2007 sur les conditions d’utilisation de la marque Louvre?
Cet accord est très complexe, mais ce qui est important à retenir pour les deux parties, c’est cet engagement réciproque sur la qualité, aussi bien sur les critères de sécurité du bâtiment que sur les conditions d’exposition des oeuvres au public. Il ne faut pas oublier qu’un musée est un lieu où on expose des œuvres et où on reçoit des visiteurs. Là, on a mis les critères internationaux à son plus haut niveau. Et avec la marque Louvre, vient cette série d’engagements. Ce qui est très important à souligner, c’est qu’il ne s’agit en aucun cas d’une franchise, mais d’un projet unique. Pour Abu Dhabi, c’est un pari très audacieux sur sa puissance publique, culturelle et économique, et pour le mettre en œuvre, il est allé chercher un des meilleurs partenaires dans le monde qui est le système muséal français.
Concrètement, combien le Musée du Louvre Abu Dhabi peut rapporter au Musée du Louvre?
Le fait d’être reconnu mondialement en participant à ce pari, c’est la reconnaissance réelle et concrète de son expertise. Ça fait partie du rayonnement de la France. Mais il ne faut pas oublier celui des Emirats, parce qu'ils ont été capables de mettre ce projet en oeuvre.
En termes d’audience, quel type de public vise le Musée du Louvre Abu Dhabi?
Aujourd’hui, on a deux axes de priorité. Le premier consiste à enraciner le Louvre Abu Dhabi dans son environnement, donc on va jouer sur une audience de proximité, qu’il s’agisse des Emiriens, ou des résidents de passage. On va travailler sur de l’événementiel, des nouveautés et tout ce qui permet au public de venir et surtout de revenir. L’idée est de faire du Musée du Louvre Abu Dhabi un lieu de vie. Ça passe aussi beaucoup par un travail avec les écoles et les universités pour toucher les élèves et les familles. Le second axe, c’est le pari économique de développement touristique pour lequel Abu Dhabi se dote d’une capacité d’accueil très importante. Il y a déjà toute une offre de loisirs existante avec l’île de Yas, une mise en valeur du patrimoine avec des découvertes archéologiques et une pratique nature autour du désert ou de la mer. Et aujourd'hui, il y a le Louvre Abu Dhabi qui permet de passer un vrai et important moment culturel. Donc on est clairement dans un programme d’enrichissement d’une offre touristique qui se développe de manière très dynamique.
Quels objectifs vous vous êtes fixé pour la première année en termes de billetterie?
Si notre objectif est bien élevé, nous l'avons pas encore de chiffres particuliers à transmettre.
Que retiendriez-vous de ce chantier qui s’est étendu sur 10 années?
Un cycle de 10 ans sur un tel projet que l’on pourrait comparer avec la Pyramide du Louvre et l’Opéra de Sidney, ce n’est pas si long. Je dis toujours qu’il y a quatre piliers dans un musée. Le premier, c’est le bâtiment de Jean Nouvel. Il est incroyable de par sa taille et sa beauté et il a été construit en seulement quatre ans. Le deuxième, c’est la collection, autrement dit le contenu qui sera exposé au public. Au fil de ces 10 ans, on a construit une histoire, on a acheté une collection de premier plan et on a négocié avec des musées français des prêts extrêmement importants.Dix ans pour avoir une collection qui fasse sens, c’était vraiment nécessaire. Le troisième élément qui constitue un musée, c’est l’équipe. Et construire cette équipe multiculturelle qui investit dans une nouvelle génération émirienne et qui en même temps amène de l’expertise du monde entier, ça a été un long cheminement et c’est normal que ça prenne du temps. Le dernier élément, c’est le public. On ouvre au grand public le 11 novembre et on a pris le temps de le préparer pour le comprendre à travers des expositions préparatoires et des conférences. Sur ces quatre piliers on a utilisé le temps qui était nécessaire. Aujourd'hui, on entre dans la phase ouverture et on approche de la phase exploitation.
Le Musée du Louvre Abu Dhabi en chiffres:
600 millions d'euros: l'enveloppe de départ pour la construction du Louvre Abu Dhabi, intégralement prise en charge par les Emirats.
1 milliard d'euros: signé en 2007, l'accord intergouvernemental prévoit que Paris, représentée par l'Agence France-Muséums, apporte son expertise, prête des oeuvres d'art et organise des expositions temporaires contre 1 milliard d'euros.
400 millions d'euros: la seule concession de la marque Louvre jusqu'en 2037 rapporte au Musée du Louvre 400 millions d'euros.
40 millions d'euros: le musée du Louvre Abu Dhabi a commencé avec un budget annuel d'acquisitions d'environ 40 millions d'euros.
25 millions d'euros: en marge de l'accord de 2007, un mécénat exceptionnel de 25 millions d'euros a été accordé de la part des autorités d'Abu Dhabi en vue du réaménagement de l'Aile de Flore du Musée du Louvre.
Dix ans après la signature de l'accord intergouvernemental entre les Emirats Arabes Unis et la France, le Louvre Abu Dhabi qui se définit comme le premier musée universel du monde arabe sera inauguré ce mercredi à 20h00, en présence d'Emmanuel Macron, de l'homme fort des Emirats Arabes Unis Mohammed ben Zayed Al-Nahyane ainsi que d'autres dirigeants, dont le roi Mohammed VI du Maroc. L'ouverture au grand public est programmée ce samedi 11 novembre, suivie de trois jours de festivités avec des concerts et des spectacles par des artistes du monde entier. Situé sur l'île de Saadiyat où sont attendus le Guggenheim et le Zayed National Museum, ce musée de sable et de lumière conçu par l'architecte français Jean Nouvel a pour vocation de "s'ouvrir aux autres", comme l'a souligné le 7 novembre en conférence de presse Jean-Luc Martinez, président du Louvre à Paris. Diplômé de l'institut d'études politiques de Paris et d'HEC, Manuel Rabaté a été nommé directeur du Musée du Louvre Abu Dhabi en 2016. Pour Challenges, il revient sur le fonctionnement complexe de cette structure émirienne qui permet à la France de rayonner de par son expertise.
Comment fonctionne administrativement le Musée du Louvre Abu Dhabi?
Le Musée du Louvre Abu Dhabi est un musée émirien, donc une structure rattachée au département de la culture et du tourisme, qui est l’équivalent d’un ministère en France. S’il porte un nom qui le rattache à la France, la structure de ce musée est bien émirienne. Aujourd’hui, on a un partenaire français – L’Agence France – Muséums – qui a été créée par l’accord intergouvernemental signé le 6 mars 2007 entre les Émirats Arabes Unis et la France pour mobiliser les musées français. Elle compte une quarantaine d’employés. Du côté émirien, nous sommes une équipe de soixante personnes, dont moi. En tout, le Louvre Abu Dhabi mobilise une centaine d’employés, de toutes nationalités.
Pouvez-vous préciser les termes de l’accord intergouvernemental conclu en 2007 sur les conditions d’utilisation de la marque Louvre?
Cet accord est très complexe, mais ce qui est important à retenir pour les deux parties, c’est cet engagement réciproque sur la qualité, aussi bien sur les critères de sécurité du bâtiment que sur les conditions d’exposition des oeuvres au public. Il ne faut pas oublier qu’un musée est un lieu où on expose des œuvres et où on reçoit des visiteurs. Là, on a mis les critères internationaux à son plus haut niveau. Et avec la marque Louvre, vient cette série d’engagements. Ce qui est très important à souligner, c’est qu’il ne s’agit en aucun cas d’une franchise, mais d’un projet unique. Pour Abu Dhabi, c’est un pari très audacieux sur sa puissance publique, culturelle et économique, et pour le mettre en œuvre, il est allé chercher un des meilleurs partenaires dans le monde qui est le système muséal français.
Concrètement, combien le Musée du Louvre Abu Dhabi peut rapporter au Musée du Louvre?
Le fait d’être reconnu mondialement en participant à ce pari, c’est la reconnaissance réelle et concrète de son expertise. Ça fait partie du rayonnement de la France. Mais il ne faut pas oublier celui des Emirats, parce qu'ils ont été capables de mettre ce projet en oeuvre.
En termes d’audience, quel type de public vise le Musée du Louvre Abu Dhabi?
Aujourd’hui, on a deux axes de priorité. Le premier consiste à enraciner le Louvre Abu Dhabi dans son environnement, donc on va jouer sur une audience de proximité, qu’il s’agisse des Emiriens, ou des résidents de passage. On va travailler sur de l’événementiel, des nouveautés et tout ce qui permet au public de venir et surtout de revenir. L’idée est de faire du Musée du Louvre Abu Dhabi un lieu de vie. Ça passe aussi beaucoup par un travail avec les écoles et les universités pour toucher les élèves et les familles. Le second axe, c’est le pari économique de développement touristique pour lequel Abu Dhabi se dote d’une capacité d’accueil très importante. Il y a déjà toute une offre de loisirs existante avec l’île de Yas, une mise en valeur du patrimoine avec des découvertes archéologiques et une pratique nature autour du désert ou de la mer. Et aujourd'hui, il y a le Louvre Abu Dhabi qui permet de passer un vrai et important moment culturel. Donc on est clairement dans un programme d’enrichissement d’une offre touristique qui se développe de manière très dynamique.
Quels objectifs vous vous êtes fixé pour la première année en termes de billetterie?
Si notre objectif est bien élevé, nous l'avons pas encore de chiffres particuliers à transmettre.
Que retiendriez-vous de ce chantier qui s’est étendu sur 10 années?
Un cycle de 10 ans sur un tel projet que l’on pourrait comparer avec la Pyramide du Louvre et l’Opéra de Sidney, ce n’est pas si long. Je dis toujours qu’il y a quatre piliers dans un musée. Le premier, c’est le bâtiment de Jean Nouvel. Il est incroyable de par sa taille et sa beauté et il a été construit en seulement quatre ans. Le deuxième, c’est la collection, autrement dit le contenu qui sera exposé au public. Au fil de ces 10 ans, on a construit une histoire, on a acheté une collection de premier plan et on a négocié avec des musées français des prêts extrêmement importants.Dix ans pour avoir une collection qui fasse sens, c’était vraiment nécessaire. Le troisième élément qui constitue un musée, c’est l’équipe. Et construire cette équipe multiculturelle qui investit dans une nouvelle génération émirienne et qui en même temps amène de l’expertise du monde entier, ça a été un long cheminement et c’est normal que ça prenne du temps. Le dernier élément, c’est le public. On ouvre au grand public le 11 novembre et on a pris le temps de le préparer pour le comprendre à travers des expositions préparatoires et des conférences. Sur ces quatre piliers on a utilisé le temps qui était nécessaire. Aujourd'hui, on entre dans la phase ouverture et on approche de la phase exploitation.
Le Musée du Louvre Abu Dhabi en chiffres:
600 millions d'euros: l'enveloppe de départ pour la construction du Louvre Abu Dhabi, intégralement prise en charge par les Emirats.
1 milliard d'euros: signé en 2007, l'accord intergouvernemental prévoit que Paris, représentée par l'Agence France-Muséums, apporte son expertise, prête des oeuvres d'art et organise des expositions temporaires contre 1 milliard d'euros.
400 millions d'euros: la seule concession de la marque Louvre jusqu'en 2037 rapporte au Musée du Louvre 400 millions d'euros.
40 millions d'euros: le musée du Louvre Abu Dhabi a commencé avec un budget annuel d'acquisitions d'environ 40 millions d'euros.
25 millions d'euros: en marge de l'accord de 2007, un mécénat exceptionnel de 25 millions d'euros a été accordé de la part des autorités d'Abu Dhabi en vue du réaménagement de l'Aile de Flore du Musée du Louvre.
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