Search

Cannes 2018 : "Le Livre d'image", la poésie politique de Godard en compétition

Cinéma-Histoire

Que l’on ne s’y trompe pas, "Le Livre d’image" n’est pas un documentaire-bilan sur l’état de la planète. On est chez Godard, et le didactisme n’est pas de mise. Le cinéaste renouvelle encore son questionnement éternel sur la matière cinéma, tout en détournant ses pairs pour mieux montrer leur pérennité. Cela constitue la première partie du "Livre d’image", où Godard enquille les citations de films avec des extraits dont il grossit le grain de l’image, triture les tons et les couleurs : "Le Mécano de la Générale" de Keaton, "Le Dernier des hommes" de Murnau, le western hollywoodien…, allant jusqu’à s’auto-citer. Avec eux, avec lui, il raconte l'Histoire du cinéma, l’Histoire du monde, l’Histoire des hommes.
"Le Livre d'image" : la bande annonce
Dans un deuxième temps, "Le Livre d’image" filme un conte géopolitique sur les conflits des pays du Golfe persique, avec des images originales mêlées à des plans de reportages, pour en reconstituer, là encore, l’Histoire. L’ensemble est accompagné de la voix off de Godard, volontairement quasiment incompréhensible, d’inserts de textes à l’écran, de virages colorés, tout le fatras godardien, pour évoquer celui du monde. Mais un fatras cohérent, où la nature numérique exalte la matière argentique du cinéma. Comme si l’électronique servait à révéler une matière vivante, par le grain de l’image, les perforations de la pellicule qui ne sont plus avec le support digital, un montage provocateur, scandé de plans noirs, un son coupé, qui se chevauche... Godard exalte une mécanique organique. Tout en gardant le texte comme valeur cardinale, d’où le titre, "Le Livre d’image". N’inscrit-il pas les mots à l’écran comme des images depuis des lustres ?

Ciné-Télé-Vision

On n’explique pas Godard, on l’évoque. Comme par cet aphorisme, dont il a le secret : "L’important n’est pas de comprendre, mais que cela soit beau". Alors "Le Livre d’image" est-il beau ? Oui, comme peut l’être une installation dans une galerie. Si l’on considère celle-ci comme le prolongement de la peinture et de la sculpture, Godard serait le réalisateur où se logent les derniers retranchements du cinéma. Si ce n’était lui qui y officiait, sûr que le film serait lynché et certains ne s’en privent pas. Mais voilà, "Le Livre d’image" s’inscrit dans une œuvre globale et ne vaut pas seulement par lui-même, mais dans l'ensemble d'une oeuvre.
Le Livre d'image

Le Livre d'image

© Casa Azul Films /Ecran Noir Productions
La forme prévaut-elle donc sur le sens ? C’est un des paradoxes de Jean-Luc Godard, le paradoxe participant de la matière poétique. Le propos de son nouveau film est résolument politique, comme il l’est régulièrement (mais pas seulement) depuis "La Chinoise" (1967). Le cinéaste à choisi de faire passer le message par une poétique visuelle et sonore, donc formelle, dérangeante, sale, encore une fois organique, sinon chaotique. Autre paradoxe, "Le Livre d’image" ne trouverait-il pas son support idéal dans la télévision ? Par son format, son image pixélisée et son interprétation des couleurs, que Godard vire et sature à loisir. Toutefois, la télévision n’est pas un prolongement du cinéma (comme l’installation peut être celui des arts plastiques primordiaux). Elle est plus une dérivation, sinon la déviation d’une route principale, le cinématographe, auquel Godard fait toujours la fête.
"Le Livre d'image" de Jean-Luc Godard

"Le Livre d'image" de Jean-Luc Godard

© Wild Bunch Distribution

LA FICHE

Genre : Expérimental
Réalisateur : Jean-Luc Godard 
Pays : France
Acteurs :  acteurs inconnus
Durée : 1h30
Sortie : prochainement

Synopsis : "Rien que le silence, rien qu'un chant révolutionnaire, une histoire en cinq chapitres, comme les cinq doigts de la main." Une réflexion sur le monde arabe en 2017 à travers des images documentaires et de fiction. 

Let's block ads! (Why?)

Read Again

Cinéma-Histoire

Que l’on ne s’y trompe pas, "Le Livre d’image" n’est pas un documentaire-bilan sur l’état de la planète. On est chez Godard, et le didactisme n’est pas de mise. Le cinéaste renouvelle encore son questionnement éternel sur la matière cinéma, tout en détournant ses pairs pour mieux montrer leur pérennité. Cela constitue la première partie du "Livre d’image", où Godard enquille les citations de films avec des extraits dont il grossit le grain de l’image, triture les tons et les couleurs : "Le Mécano de la Générale" de Keaton, "Le Dernier des hommes" de Murnau, le western hollywoodien…, allant jusqu’à s’auto-citer. Avec eux, avec lui, il raconte l'Histoire du cinéma, l’Histoire du monde, l’Histoire des hommes.
"Le Livre d'image" : la bande annonce
Dans un deuxième temps, "Le Livre d’image" filme un conte géopolitique sur les conflits des pays du Golfe persique, avec des images originales mêlées à des plans de reportages, pour en reconstituer, là encore, l’Histoire. L’ensemble est accompagné de la voix off de Godard, volontairement quasiment incompréhensible, d’inserts de textes à l’écran, de virages colorés, tout le fatras godardien, pour évoquer celui du monde. Mais un fatras cohérent, où la nature numérique exalte la matière argentique du cinéma. Comme si l’électronique servait à révéler une matière vivante, par le grain de l’image, les perforations de la pellicule qui ne sont plus avec le support digital, un montage provocateur, scandé de plans noirs, un son coupé, qui se chevauche... Godard exalte une mécanique organique. Tout en gardant le texte comme valeur cardinale, d’où le titre, "Le Livre d’image". N’inscrit-il pas les mots à l’écran comme des images depuis des lustres ?

Ciné-Télé-Vision

On n’explique pas Godard, on l’évoque. Comme par cet aphorisme, dont il a le secret : "L’important n’est pas de comprendre, mais que cela soit beau". Alors "Le Livre d’image" est-il beau ? Oui, comme peut l’être une installation dans une galerie. Si l’on considère celle-ci comme le prolongement de la peinture et de la sculpture, Godard serait le réalisateur où se logent les derniers retranchements du cinéma. Si ce n’était lui qui y officiait, sûr que le film serait lynché et certains ne s’en privent pas. Mais voilà, "Le Livre d’image" s’inscrit dans une œuvre globale et ne vaut pas seulement par lui-même, mais dans l'ensemble d'une oeuvre.
Le Livre d'image

Le Livre d'image

© Casa Azul Films /Ecran Noir Productions
La forme prévaut-elle donc sur le sens ? C’est un des paradoxes de Jean-Luc Godard, le paradoxe participant de la matière poétique. Le propos de son nouveau film est résolument politique, comme il l’est régulièrement (mais pas seulement) depuis "La Chinoise" (1967). Le cinéaste à choisi de faire passer le message par une poétique visuelle et sonore, donc formelle, dérangeante, sale, encore une fois organique, sinon chaotique. Autre paradoxe, "Le Livre d’image" ne trouverait-il pas son support idéal dans la télévision ? Par son format, son image pixélisée et son interprétation des couleurs, que Godard vire et sature à loisir. Toutefois, la télévision n’est pas un prolongement du cinéma (comme l’installation peut être celui des arts plastiques primordiaux). Elle est plus une dérivation, sinon la déviation d’une route principale, le cinématographe, auquel Godard fait toujours la fête.
"Le Livre d'image" de Jean-Luc Godard

"Le Livre d'image" de Jean-Luc Godard

© Wild Bunch Distribution

LA FICHE

Genre : Expérimental
Réalisateur : Jean-Luc Godard 
Pays : France
Acteurs :  acteurs inconnus
Durée : 1h30
Sortie : prochainement

Synopsis : "Rien que le silence, rien qu'un chant révolutionnaire, une histoire en cinq chapitres, comme les cinq doigts de la main." Une réflexion sur le monde arabe en 2017 à travers des images documentaires et de fiction. 

Let's block ads! (Why?)



Bagikan Berita Ini

0 Response to "Cannes 2018 : "Le Livre d'image", la poésie politique de Godard en compétition"

Post a Comment

Powered by Blogger.