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Polémique autour du roman de Yann Moix : ces livres qui provoquent des dégâts collatéraux - Le Parisien

La France n'est pas seulement le pays aux mille fromages, c'est aussi celui, en littérature, de l'autofiction, terme né avec l'écrivain Serge Doubrovsky. Une fiction de soi. Reste la question du dosage. Plus d'« auto » ici ou plus de « fiction » ?

Tout est fonction de mémoire, de volonté d'enjoliver ou de théâtraliser. Les retombées sont plus ou moins dévastatrices pour l'entourage. Cela semble être le cas d'« Orléans », de Yann Moix qui ajoute au caractère explosif de petit chimiste la notion de martyre.

« Orléans » n'est pas une première. En 2012, Félicité Herzog, la fille du grand alpiniste Maurice Herzog, vainqueur de l'Annapurna et ministre du Général de Gaulle, avait déboulonné l'idole paternelle dans « Un héros », montrant l'hypocrisie d'une famille de la grande bourgeoisie et ses dégâts irrémédiables sur son propre frère. L'éditeur, Grasset, était aussi celui de Moix.

Christine Angot, Emmanuel Carrère, Alexandre Jardin…

Nos stars en la matière se nomment Christine Angot - condamnée en 2013 pour atteinte à la vie privée - Lionel Duroy, Édouard Louis qui a creusé un cratère avec « En finir avec Eddy Bellegueule », ou encore Emmanuel Carrère - qui avait révélé un secret de famille - et Alexandre Jardin.

On oublie bien sûr un peu vite que de grands auteurs étrangers s'y sont collés. L'américain Henry Miller par exemple (« Printemps noir ») ou le Norvégien Knut Hamsun (« La Faim »), prix Nobel, n'ont rien trafiqué de leurs années de misère. L'autofiction, oui, mais au grand air. Chez nous, le vocable invite une partie du lectorat à se pincer le nez. Il fleure le nombrilisme, le manque d'imagination, la trahison qui guette.

Notre fils a écrit un livre sur nous… À quelle sauce sera-t-on mangés ? L'autofiction n'a pas de garde-fou. Elle est un auto-exorcisme des drames et des névroses enregistrées par l'auteur. Il y a un film très juste sur ce sujet, « Chamboultout », d'Éric Lavaine, sorti en mars dernier avec Alexandra Lamy et José Garcia.

Si le grand public n'est pas toujours fan d'autofiction, ce moteur hybride de l'imaginaire, c'est qu'avoir un écrivain dans la famille est sujet à gros ennuis. Le linge sale se lave en famille, pas en librairie. Et encore moins à l'écran. La comédienne Valeria Bruni-Tedeschi passe sa filmographie à mettre en scène son clan. Heureusement, la littérature n'existe pas encore en taille 3D.

Ce que dit la loi

Yann Moix s’expose-t-il à des poursuites en justice avec son livre polémique « Orléans » ? Le délit de diffamation, passible de 12 000 euros d’amende, réprime « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ».

« Yann Moix évoque des maltraitances physiques commises par ses parents. Or, quiconque accuse autrui de faits répréhensibles pénalement, ce qui est le cas des violences parentales, peut être condamné pour diffamation », indique Me Emmanuel Pierrat, avocat spécialiste du droit de la presse. Mais encore faut-il que les géniteurs de l’écrivain déposent plainte.

Le fait que Yann Moix mentionne « Roman » en couverture de son ouvrage et ne donne jamais les prénoms de ses accusateurs ne le protège pas d’éventuelles poursuites. « Il pourrait même préciser qu’il s’agit d’une fiction, cela ne suffirait pas, relève Me Pierrat. Tant que les personnes accusées sont identifiables par leur entourage, la justice peut retenir la diffamation. »

D’autant que Yann Moix a titré son roman du nom de la ville de son enfance, a livré des détails sur le métier de son père et a même accusé ce dernier ouvertement dans les médias.

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La France n'est pas seulement le pays aux mille fromages, c'est aussi celui, en littérature, de l'autofiction, terme né avec l'écrivain Serge Doubrovsky. Une fiction de soi. Reste la question du dosage. Plus d'« auto » ici ou plus de « fiction » ?

Tout est fonction de mémoire, de volonté d'enjoliver ou de théâtraliser. Les retombées sont plus ou moins dévastatrices pour l'entourage. Cela semble être le cas d'« Orléans », de Yann Moix qui ajoute au caractère explosif de petit chimiste la notion de martyre.

« Orléans » n'est pas une première. En 2012, Félicité Herzog, la fille du grand alpiniste Maurice Herzog, vainqueur de l'Annapurna et ministre du Général de Gaulle, avait déboulonné l'idole paternelle dans « Un héros », montrant l'hypocrisie d'une famille de la grande bourgeoisie et ses dégâts irrémédiables sur son propre frère. L'éditeur, Grasset, était aussi celui de Moix.

Christine Angot, Emmanuel Carrère, Alexandre Jardin…

Nos stars en la matière se nomment Christine Angot - condamnée en 2013 pour atteinte à la vie privée - Lionel Duroy, Édouard Louis qui a creusé un cratère avec « En finir avec Eddy Bellegueule », ou encore Emmanuel Carrère - qui avait révélé un secret de famille - et Alexandre Jardin.

On oublie bien sûr un peu vite que de grands auteurs étrangers s'y sont collés. L'américain Henry Miller par exemple (« Printemps noir ») ou le Norvégien Knut Hamsun (« La Faim »), prix Nobel, n'ont rien trafiqué de leurs années de misère. L'autofiction, oui, mais au grand air. Chez nous, le vocable invite une partie du lectorat à se pincer le nez. Il fleure le nombrilisme, le manque d'imagination, la trahison qui guette.

Notre fils a écrit un livre sur nous… À quelle sauce sera-t-on mangés ? L'autofiction n'a pas de garde-fou. Elle est un auto-exorcisme des drames et des névroses enregistrées par l'auteur. Il y a un film très juste sur ce sujet, « Chamboultout », d'Éric Lavaine, sorti en mars dernier avec Alexandra Lamy et José Garcia.

Si le grand public n'est pas toujours fan d'autofiction, ce moteur hybride de l'imaginaire, c'est qu'avoir un écrivain dans la famille est sujet à gros ennuis. Le linge sale se lave en famille, pas en librairie. Et encore moins à l'écran. La comédienne Valeria Bruni-Tedeschi passe sa filmographie à mettre en scène son clan. Heureusement, la littérature n'existe pas encore en taille 3D.

Ce que dit la loi

Yann Moix s’expose-t-il à des poursuites en justice avec son livre polémique « Orléans » ? Le délit de diffamation, passible de 12 000 euros d’amende, réprime « toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ».

« Yann Moix évoque des maltraitances physiques commises par ses parents. Or, quiconque accuse autrui de faits répréhensibles pénalement, ce qui est le cas des violences parentales, peut être condamné pour diffamation », indique Me Emmanuel Pierrat, avocat spécialiste du droit de la presse. Mais encore faut-il que les géniteurs de l’écrivain déposent plainte.

Le fait que Yann Moix mentionne « Roman » en couverture de son ouvrage et ne donne jamais les prénoms de ses accusateurs ne le protège pas d’éventuelles poursuites. « Il pourrait même préciser qu’il s’agit d’une fiction, cela ne suffirait pas, relève Me Pierrat. Tant que les personnes accusées sont identifiables par leur entourage, la justice peut retenir la diffamation. »

D’autant que Yann Moix a titré son roman du nom de la ville de son enfance, a livré des détails sur le métier de son père et a même accusé ce dernier ouvertement dans les médias.

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