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Gabriel Matzneff : les coulisses de son étrange entretien sur Youtube, juste avant «l'affaire» - Le Parisien

Hasard du calendrier? Le 21 décembre dernier, juste avant que ne sortent dans la presse les premiers extraits du livre « Le consentement », dans lequel Vanessa Springora raconte avoir été abusée sexuellement lorsqu'elle était mineure par l'écrivain Gabriel Matzneff, un curieux entretien vidéo de plus d'une heure de ce dernier était publié sur Youtube.

« Interviewé » par deux étudiants, l'écrivain accusé de pédophilie y évoque son dernier ouvrage avant de lire, en toute fin de séquence, une « lettre de rupture » qui lui aurait écrite une jeune « amie », et qu'il attribue à une « Vanessa ».

Au delà du contenu, tout dans cette vidéo, le ton mondain, le décor fastueux, intrigue. Nous avons donc retrouvé son auteur, qui se trouve être le jeune homme assis à la droite de Gabriel Matzneff sur la vidéo. Simon Collin, qui se présente comme « un étudiant en lettres à La Sorbonne âgé de 21 ans» , nous confirme que la séquence a été tournée le 27 novembre dernier, dans un appartement parisien du quartier de Saint-Germain-des-Près. Celui-là même dans lequel il dit vivre avec son grand-père.

Entretiens mondains avec des « clochards célestes »

L'entretien avec Gabriel Matzneff est en fait le dernier en date d'une série d'interviews que Simon Collin réalise et diffuse en ligne, depuis un an, à une fréquence d'environ deux par mois. Parmi les « clochards célestes » - c'est le nom de l'« émission» - ayant accepté de deviser avec cet étudiant extravagant, on trouve notamment l'écrivain Denis Tillinac, l'humoriste Jean-Marie Bigard, ou l'ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg. « Ce sont des jeunes qui m'ont invité en passant par ma sœur. Je n'avais rien à y gagner mais ça m'amusait », nous confirme ce lundi Frédéric Taddei, qui se rappelle lui aussi d'un « appartement bourgeois, typique de Saint-Germain-des-Près ».

À chaque fois, le décor est le même, ou presque. L'entretien est filmé dans un grand salon décoré de plusieurs tableaux et de deux statues de têtes d'animaux, parmi d'autres objets d'art. Simon Collin, parfois accompagné d'un ou de plusieurs autres étudiants d'écoles ou d'universités parisiennes, est placé à côté de son invité. L'ambiance est assez mondaine, le ton plutôt précieux et complaisant. Ce que Simon Collin reconnaît comme étant aussi « une stratégie ». « C'est avec ce ton qu'on peut obtenir que l'invité dise des choses, un peu comme un scoop pour un journaliste », assure l'étudiant.

Comment sont choisis ces invités (quasiment que des hommes - « un hasard », jure Simon Collin) ? « On veut faire découvrir des originaux, qui sortent du cloisonnement du système très mainstream », décrit l'étudiant. « L'idée est soit de réussir à faire quelque chose d'original et d'un peu amusant avec un intellectuel, soit à l'inverse de faire une émission un peu plus intelligente et intello avec une personnalité plutôt superficielle », poursuit-il.

Le programme est pour l'heure totalement confidentiel, avec une moyenne d'un millier de vues par vidéo, à l'exception de l'interview de Jean-Marie Bigard, qui tutoie les 100 000 vues.

Sur ses pages Facebook et Instagram, Simon Collin publie également régulièrement des photos ou de courtes vidéos des dîners « privés » qu'il organise chaque semaine avec les mêmes invités.

Matzneff et sa « lettre de rupture »

Concernant l'émission avec Matzneff tournée le 27 novembre, le contact aurait été pris avec l'écrivain « via trois amis communs, quinze jours plus tôt », assure Simon Collin. À l'époque, l'étudiant avait entendu dire qu'un livre allait sortir début janvier, mais il n'en connaissait pas le contenu, assure-t-il aujourd'hui. « On a invité Matzneff pour qu'il nous parle de son bouquin à lui, L'Amante de l'Arsenal, de ses liens passés avec François Mitterrand, etc. », détaille Simon Collin. Mais d'après lui, l'écrivain « avait eu accès à des épreuves du livre de Vanessa Springora et avait pu le lire quasiment en entier », au moment d'accepter l'émission. C'est d'ailleurs pour cela que Matzneff aurait selon lui accepté d'y participer : pour réagir à l'avance aux accusations portées dans « Le Consentement » contre un certain « G » ou « G.M. ».

À la toute fin de la vidéo, au bout d'environ 1h06, Simon Collin s'adresse donc à Matzneff : « Je crois que vous vouliez dire un mot sur les demoiselles du Tarane [du nom d'un ancien hôtel situé boulevard Saint-Germain et fréquenté par Matzneff dans les années 1980, NDLR], et peut-être même lire quelque chose ». Comme si le « coup » était préparé à l'avance. « Je pensais lire la lettre de rupture de la première de ces demoiselles du Tarane », répond l'écrivain.

Quelques minutes plus tard, cette fois seul face à la caméra, Matzneff lit la fin de ce courrier. « Tu es et resteras jusqu'à ma mort mon premier amour et jamais je n'oublierai tout ce que nous avons vécu et combien nous nous sommes aimés », est-il notamment écrit.

Lorsqu'il prononce le nom inscrit en signature, le son se coupe. Mais on lit sur ses lèvres « Vanessa », comme indiqué également dans le titre de la vidéo. Impossible, pour le moment, d'authentifier ce document, faute notamment d'avoir obtenu une réponse de Vanessa Springora. Mais si c'est bien elle qui a écrit cette lettre à l'âge de 14 ou 15 ans, il faut recontextualiser. Car dans son livre à paraître jeudi, l'éditrice raconte qu'elle était totalement sous emprise de Matzneff à cet âge-là. « Dès les premières minutes, on comprenait qu'il voulait répondre à ce bouquin », indique aujourd'hui Simon Collin.

« Je suis assez ennuyé, car je ne le défends absolument pas »

Pourquoi avoir mis en ligne cette vidéo le 21 décembre dernier, soit juste avant que ne sortent dans la presse les premiers articles annonçant la sortie du « Consentement » ? S'il assure que l'interview a été enregistrée « bien avant la tempête médiatique Matzneff », ce qui est vrai, Simon Collin reconnaît dans le même temps que la mise en ligne a été un peu précipitée pour coller à l'actualité. En partageant la vidéo sur sa page Facebook, il se réjouit d'ailleurs : « Malgré toutes les menaces, les bassesses et les censeurs Gabriel MATZNEFF est dans les clochards célestes ! »

Si l'écrivain est très discret depuis plusieurs jours, il a simplement dénoncé auprès du Parisien ce dimanche des attaques « injustes et excessives ».

Aujourd'hui, Simon Collin ne souhaite pas être considéré comme l'avocat ou le défenseur de Matzneff. « Je suis assez ennuyé, car je ne le défends absolument pas », assure-t-il. Et l'étudiant de conclure : « On est vraiment dans une logique de témoignage. C'est pour ça qu'à la fin de la vidéo, on le laisse seul face à ses dires. »

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Hasard du calendrier? Le 21 décembre dernier, juste avant que ne sortent dans la presse les premiers extraits du livre « Le consentement », dans lequel Vanessa Springora raconte avoir été abusée sexuellement lorsqu'elle était mineure par l'écrivain Gabriel Matzneff, un curieux entretien vidéo de plus d'une heure de ce dernier était publié sur Youtube.

« Interviewé » par deux étudiants, l'écrivain accusé de pédophilie y évoque son dernier ouvrage avant de lire, en toute fin de séquence, une « lettre de rupture » qui lui aurait écrite une jeune « amie », et qu'il attribue à une « Vanessa ».

Au delà du contenu, tout dans cette vidéo, le ton mondain, le décor fastueux, intrigue. Nous avons donc retrouvé son auteur, qui se trouve être le jeune homme assis à la droite de Gabriel Matzneff sur la vidéo. Simon Collin, qui se présente comme « un étudiant en lettres à La Sorbonne âgé de 21 ans» , nous confirme que la séquence a été tournée le 27 novembre dernier, dans un appartement parisien du quartier de Saint-Germain-des-Près. Celui-là même dans lequel il dit vivre avec son grand-père.

Entretiens mondains avec des « clochards célestes »

L'entretien avec Gabriel Matzneff est en fait le dernier en date d'une série d'interviews que Simon Collin réalise et diffuse en ligne, depuis un an, à une fréquence d'environ deux par mois. Parmi les « clochards célestes » - c'est le nom de l'« émission» - ayant accepté de deviser avec cet étudiant extravagant, on trouve notamment l'écrivain Denis Tillinac, l'humoriste Jean-Marie Bigard, ou l'ancien ministre socialiste Arnaud Montebourg. « Ce sont des jeunes qui m'ont invité en passant par ma sœur. Je n'avais rien à y gagner mais ça m'amusait », nous confirme ce lundi Frédéric Taddei, qui se rappelle lui aussi d'un « appartement bourgeois, typique de Saint-Germain-des-Près ».

À chaque fois, le décor est le même, ou presque. L'entretien est filmé dans un grand salon décoré de plusieurs tableaux et de deux statues de têtes d'animaux, parmi d'autres objets d'art. Simon Collin, parfois accompagné d'un ou de plusieurs autres étudiants d'écoles ou d'universités parisiennes, est placé à côté de son invité. L'ambiance est assez mondaine, le ton plutôt précieux et complaisant. Ce que Simon Collin reconnaît comme étant aussi « une stratégie ». « C'est avec ce ton qu'on peut obtenir que l'invité dise des choses, un peu comme un scoop pour un journaliste », assure l'étudiant.

Comment sont choisis ces invités (quasiment que des hommes - « un hasard », jure Simon Collin) ? « On veut faire découvrir des originaux, qui sortent du cloisonnement du système très mainstream », décrit l'étudiant. « L'idée est soit de réussir à faire quelque chose d'original et d'un peu amusant avec un intellectuel, soit à l'inverse de faire une émission un peu plus intelligente et intello avec une personnalité plutôt superficielle », poursuit-il.

Le programme est pour l'heure totalement confidentiel, avec une moyenne d'un millier de vues par vidéo, à l'exception de l'interview de Jean-Marie Bigard, qui tutoie les 100 000 vues.

Sur ses pages Facebook et Instagram, Simon Collin publie également régulièrement des photos ou de courtes vidéos des dîners « privés » qu'il organise chaque semaine avec les mêmes invités.

Matzneff et sa « lettre de rupture »

Concernant l'émission avec Matzneff tournée le 27 novembre, le contact aurait été pris avec l'écrivain « via trois amis communs, quinze jours plus tôt », assure Simon Collin. À l'époque, l'étudiant avait entendu dire qu'un livre allait sortir début janvier, mais il n'en connaissait pas le contenu, assure-t-il aujourd'hui. « On a invité Matzneff pour qu'il nous parle de son bouquin à lui, L'Amante de l'Arsenal, de ses liens passés avec François Mitterrand, etc. », détaille Simon Collin. Mais d'après lui, l'écrivain « avait eu accès à des épreuves du livre de Vanessa Springora et avait pu le lire quasiment en entier », au moment d'accepter l'émission. C'est d'ailleurs pour cela que Matzneff aurait selon lui accepté d'y participer : pour réagir à l'avance aux accusations portées dans « Le Consentement » contre un certain « G » ou « G.M. ».

À la toute fin de la vidéo, au bout d'environ 1h06, Simon Collin s'adresse donc à Matzneff : « Je crois que vous vouliez dire un mot sur les demoiselles du Tarane [du nom d'un ancien hôtel situé boulevard Saint-Germain et fréquenté par Matzneff dans les années 1980, NDLR], et peut-être même lire quelque chose ». Comme si le « coup » était préparé à l'avance. « Je pensais lire la lettre de rupture de la première de ces demoiselles du Tarane », répond l'écrivain.

Quelques minutes plus tard, cette fois seul face à la caméra, Matzneff lit la fin de ce courrier. « Tu es et resteras jusqu'à ma mort mon premier amour et jamais je n'oublierai tout ce que nous avons vécu et combien nous nous sommes aimés », est-il notamment écrit.

Lorsqu'il prononce le nom inscrit en signature, le son se coupe. Mais on lit sur ses lèvres « Vanessa », comme indiqué également dans le titre de la vidéo. Impossible, pour le moment, d'authentifier ce document, faute notamment d'avoir obtenu une réponse de Vanessa Springora. Mais si c'est bien elle qui a écrit cette lettre à l'âge de 14 ou 15 ans, il faut recontextualiser. Car dans son livre à paraître jeudi, l'éditrice raconte qu'elle était totalement sous emprise de Matzneff à cet âge-là. « Dès les premières minutes, on comprenait qu'il voulait répondre à ce bouquin », indique aujourd'hui Simon Collin.

« Je suis assez ennuyé, car je ne le défends absolument pas »

Pourquoi avoir mis en ligne cette vidéo le 21 décembre dernier, soit juste avant que ne sortent dans la presse les premiers articles annonçant la sortie du « Consentement » ? S'il assure que l'interview a été enregistrée « bien avant la tempête médiatique Matzneff », ce qui est vrai, Simon Collin reconnaît dans le même temps que la mise en ligne a été un peu précipitée pour coller à l'actualité. En partageant la vidéo sur sa page Facebook, il se réjouit d'ailleurs : « Malgré toutes les menaces, les bassesses et les censeurs Gabriel MATZNEFF est dans les clochards célestes ! »

Si l'écrivain est très discret depuis plusieurs jours, il a simplement dénoncé auprès du Parisien ce dimanche des attaques « injustes et excessives ».

Aujourd'hui, Simon Collin ne souhaite pas être considéré comme l'avocat ou le défenseur de Matzneff. « Je suis assez ennuyé, car je ne le défends absolument pas », assure-t-il. Et l'étudiant de conclure : « On est vraiment dans une logique de témoignage. C'est pour ça qu'à la fin de la vidéo, on le laisse seul face à ses dires. »

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