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Pause séries : « Stranger Things » saison 4 ou les ravages de l'inflation - Le Monde

De gauche à droite : Nancy Wheeler (Natalia Dyer), Steve Harrington (Joe Keery), Dustin Henderson (Gaten Matarazzo), Robin Buckley (Maya Hawke), Max Mayfield (Sadie Sink) et Lucas Sinclair (Caleb McLaughlin) dans la saison 4 de « Stranger Things ».

CHRONIQUE

Hawkins dans l’Indiana est la « république de Weimar des séries », une communauté ruinée par l’inflation. En juillet 2016, il fallait quarante minutes pour consommer le premier épisode de Stranger Things, que ses créateurs avaient situé dans cette petite ville du Midwest. Aujourd’hui, 1er juillet 2022, il en faut cent de plus pour arriver à bout du neuvième et dernier épisode de la quatrième saison. Malgré le vacarme incessant de la bande-son, les affrontements ici-bas et dans l’au-delà (qui, dans Stranger Things, s’appelle « the Upside Down » ou « le monde à l’envers »), et l’extermination d’une partie des personnages, les quatre heures passées devant la conclusion apocalyptique de cette saison laissent à l’esprit le temps de divaguer.

D’abord autour de la propension de Netflix à gaver ses abonnés, comme cela se fait dans un élevage de palmipèdes. La plate-forme se refuse à égrener les épisodes semaine après semaine. Certes, il lui arrive de diviser une saison en deux (de préférence à cheval sur deux trimestres, ce qui permet de rassurer Wall Street quant à l’évolution du nombre des abonnés lors de la publication des communiqués trimestriels), mais les portions restent celles que l’on sert dans les restaurants de l’Indiana, dont la taille est inverse aux bénéfices nutritionnels.

Pour remplir les douze heures que dure cette saison, les frères Duffer, créateurs de la série, ont multiplié les théâtres d’opération. Aux deux villes d’Hawkins (celle située dans notre monde et son double du monde à l’envers), ils ont ajouté un établissement du goulag dans le Kamtchatka, une petite ville de Californie et un laboratoire secret dans le désert du Nevada. Les protagonistes enfantins (devenus depuis adolescents) des premières saisons ne suffisaient plus à peupler ces décors : certains personnages secondaires ont été promus, d’autres surgissent, comme si le champ n’était déjà assez bondé.

Ainsi, en Californie, la faction en exil de la bande originelle reçoit le concours d’Argyle, pizzaïolo consommateur de THC (Eduardo Franco), qui s’inspire largement des facéties de Mike Myers au temps de Wayne’s World, pendant qu’à Hawkins le groupe autochtone reçoit le renfort d’Eddie Munson (Joseph Quinn), guitariste de hard-rock, accusé de satanisme par ses concitoyens. Le premier servira à ménager des pauses comiques dans un récit de plus en plus horrifique, le second à nuancer un peu le tableau d’une époque dont les frères Duffer avaient donné jusqu’ici une représentation plutôt pop. Cette dernière tendance n’a pas complètement disparu, comme en témoigne le succès tardif et massif que Running Up That Hill, titre de Kate Bush enregistré en 1985, a connu grâce à son emploi entêtant tout au long de cette quatrième saison.

Il vous reste 46.18% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.

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Hawkins dans l’Indiana est la « république de Weimar des séries », une communauté ruinée par l’inflation. En juillet 2016, il fallait quarante minutes pour consommer le premier épisode de Stranger Things, que ses créateurs avaient situé dans cette petite ville du Midwest. Aujourd’hui, 1er juillet 2022, il en faut cent de plus pour arriver à bout du neuvième et dernier épisode de la quatrième saison. Malgré le vacarme incessant de la bande-son, les affrontements ici-bas et dans l’au-delà (qui, dans Stranger Things, s’appelle « the Upside Down » ou « le monde à l’envers »), et l’extermination d’une partie des personnages, les quatre heures passées devant la conclusion apocalyptique de cette saison laissent à l’esprit le temps de divaguer.

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Pour remplir les douze heures que dure cette saison, les frères Duffer, créateurs de la série, ont multiplié les théâtres d’opération. Aux deux villes d’Hawkins (celle située dans notre monde et son double du monde à l’envers), ils ont ajouté un établissement du goulag dans le Kamtchatka, une petite ville de Californie et un laboratoire secret dans le désert du Nevada. Les protagonistes enfantins (devenus depuis adolescents) des premières saisons ne suffisaient plus à peupler ces décors : certains personnages secondaires ont été promus, d’autres surgissent, comme si le champ n’était déjà assez bondé.

Ainsi, en Californie, la faction en exil de la bande originelle reçoit le concours d’Argyle, pizzaïolo consommateur de THC (Eduardo Franco), qui s’inspire largement des facéties de Mike Myers au temps de Wayne’s World, pendant qu’à Hawkins le groupe autochtone reçoit le renfort d’Eddie Munson (Joseph Quinn), guitariste de hard-rock, accusé de satanisme par ses concitoyens. Le premier servira à ménager des pauses comiques dans un récit de plus en plus horrifique, le second à nuancer un peu le tableau d’une époque dont les frères Duffer avaient donné jusqu’ici une représentation plutôt pop. Cette dernière tendance n’a pas complètement disparu, comme en témoigne le succès tardif et massif que Running Up That Hill, titre de Kate Bush enregistré en 1985, a connu grâce à son emploi entêtant tout au long de cette quatrième saison.

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