La romancière Claire Etcherelli, révélée avec Elise ou la Vraie Vie, est morte, a-t-on appris jeudi auprès de son dernier éditeur, Le Bord de l’eau. Elle avait 89 ans. « Elle nous aura donné son dernier roman Prenez grand soin de m’oublier (2021), nous ferons en sorte de ne pas suivre son conseil », a témoigné l’éditeur, qui lui rend hommage sur son site Internet.
Elise ou la Vraie Vie (éditions Denoël), roman d’inspiration autobiographique, avait reçu le prix Femina 1967 et été adapté au cinéma en 1970, avec Marie-José Nat. Le jury du Femina se montra très partagé cette année-là, ne trouvant jamais de majorité absolue, et attendant le dixième tour, où une majorité simple suffisait.
Claire Etcherelli a toujours exploré le vaste territoire des pauvres. Dans Elise ou la Vraie Vie, elle tirait sa matière romanesque de son expérience à la chaîne en usine, non en volontaire comme Simone Weil, mais pour gagner sa vie. Elle l’avait faite au moment où la tension était le plus rude entre le peuple français et les travailleurs algériens. Elise ou la Vraie Vie apporte là-dessus un témoignage vécu. « Sans doute je n’aurais pas cherché à rencontrer des Algériens, mais le fait de travailler avec eux, de les côtoyer m’a permis de les connaître à un moment où bien peu avaient cette expérience. C’est cette expérience que j’ai voulu traduire… », expliquera-t-elle au Monde, en 1967.
« Tout ce qui dans mon livre concerne le racisme et les problèmes des Algériens est réel, et je n’ai eu qu’à choisir entre tous les faits dont j’ai eu connaissance. Dès 1947, le hasard m’avait mise au courant du fait algérien. Je croyais alors que le racisme était l’apanage de certaines classes, qu’il n’existait pas à l’usine. J’avais des illusions. Les ouvriers aussi sont racistes, le plus souvent par esprit de concurrence ou parce que l’existence de parias leur permet de s’affirmer, et les ouvrières le sont plus encore, car pour elles l’Arabe est un agresseur de femmes. A l’époque où se situe le roman, la guerre d’Algérie faisait du “Noraf” l’ennemi. Les Français, hommes ou femmes, avaient peur, les Algériens plus encore.
Je plaignais ce gibier traqué, ces gens pris entre la brutale surveillance de la police française et les obligations que faisaient peser sur eux les dirigeants du FLN (Front de libération nationale algérien) : plus le droit de fumer, de boire du vin, verser l’impôt.
Le vide se faisait autour de moi parce que je m’intéressais aux “ratons”. »
Une certaine distance avec le monde littéraire
Le livre racontait les amours clandestines à Paris entre deux ouvriers, une Française d’origine très modeste et un immigré algérien militant pour l’indépendance. Il exposait le tabou du racisme dans la société française des années 1950-1960, en particulier des brimades subies par les immigrés maghrébins. Elise ou la Vraie Vie, roman réaliste, a aussi été salué pour avoir dépeint avec justesse la condition des jeunes femmes en usine. Simone de Beauvoir, qui l’avait apprécié, fit embaucher en 1973 Claire Etcherelli comme secrétaire de rédaction au sein de la revue Les Temps modernes.
L’autrice publia entre 1971 et 2021 cinq autres romans, dont les deux premiers aux Editions Gallimard, qui ne connurent pas le même succès. Originaire de Bordeaux, orpheline après la mort en déportation de son père résistant, elle avait abandonné ses études et était devenue mère célibataire très jeune.
Malgré les éloges pour son premier roman, Claire Etcherelli garda toujours une certaine distance avec le monde littéraire, se revendiquant « employée de bureau ».
Ses obsèques ont lieu jeudi à Paris.
La romancière Claire Etcherelli, révélée avec Elise ou la Vraie Vie, est morte, a-t-on appris jeudi auprès de son dernier éditeur, Le Bord de l’eau. Elle avait 89 ans. « Elle nous aura donné son dernier roman Prenez grand soin de m’oublier (2021), nous ferons en sorte de ne pas suivre son conseil », a témoigné l’éditeur, qui lui rend hommage sur son site Internet.
Elise ou la Vraie Vie (éditions Denoël), roman d’inspiration autobiographique, avait reçu le prix Femina 1967 et été adapté au cinéma en 1970, avec Marie-José Nat. Le jury du Femina se montra très partagé cette année-là, ne trouvant jamais de majorité absolue, et attendant le dixième tour, où une majorité simple suffisait.
Claire Etcherelli a toujours exploré le vaste territoire des pauvres. Dans Elise ou la Vraie Vie, elle tirait sa matière romanesque de son expérience à la chaîne en usine, non en volontaire comme Simone Weil, mais pour gagner sa vie. Elle l’avait faite au moment où la tension était le plus rude entre le peuple français et les travailleurs algériens. Elise ou la Vraie Vie apporte là-dessus un témoignage vécu. « Sans doute je n’aurais pas cherché à rencontrer des Algériens, mais le fait de travailler avec eux, de les côtoyer m’a permis de les connaître à un moment où bien peu avaient cette expérience. C’est cette expérience que j’ai voulu traduire… », expliquera-t-elle au Monde, en 1967.
« Tout ce qui dans mon livre concerne le racisme et les problèmes des Algériens est réel, et je n’ai eu qu’à choisir entre tous les faits dont j’ai eu connaissance. Dès 1947, le hasard m’avait mise au courant du fait algérien. Je croyais alors que le racisme était l’apanage de certaines classes, qu’il n’existait pas à l’usine. J’avais des illusions. Les ouvriers aussi sont racistes, le plus souvent par esprit de concurrence ou parce que l’existence de parias leur permet de s’affirmer, et les ouvrières le sont plus encore, car pour elles l’Arabe est un agresseur de femmes. A l’époque où se situe le roman, la guerre d’Algérie faisait du “Noraf” l’ennemi. Les Français, hommes ou femmes, avaient peur, les Algériens plus encore.
Je plaignais ce gibier traqué, ces gens pris entre la brutale surveillance de la police française et les obligations que faisaient peser sur eux les dirigeants du FLN (Front de libération nationale algérien) : plus le droit de fumer, de boire du vin, verser l’impôt.
Le vide se faisait autour de moi parce que je m’intéressais aux “ratons”. »
Une certaine distance avec le monde littéraire
Le livre racontait les amours clandestines à Paris entre deux ouvriers, une Française d’origine très modeste et un immigré algérien militant pour l’indépendance. Il exposait le tabou du racisme dans la société française des années 1950-1960, en particulier des brimades subies par les immigrés maghrébins. Elise ou la Vraie Vie, roman réaliste, a aussi été salué pour avoir dépeint avec justesse la condition des jeunes femmes en usine. Simone de Beauvoir, qui l’avait apprécié, fit embaucher en 1973 Claire Etcherelli comme secrétaire de rédaction au sein de la revue Les Temps modernes.
L’autrice publia entre 1971 et 2021 cinq autres romans, dont les deux premiers aux Editions Gallimard, qui ne connurent pas le même succès. Originaire de Bordeaux, orpheline après la mort en déportation de son père résistant, elle avait abandonné ses études et était devenue mère célibataire très jeune.
Malgré les éloges pour son premier roman, Claire Etcherelli garda toujours une certaine distance avec le monde littéraire, se revendiquant « employée de bureau ».
Ses obsèques ont lieu jeudi à Paris.
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