
Salvator Mundi, un tableau de Lénoard de Vinci a trouvé preneur pour 450 millions de dollars, une somme record. Comment justifier un tel montant? Qu'a-t-il de si spécial? Décryptage.
"C'était un grand moment pour Christie's et, je crois, un grand moment pour le marché de l'art". Guillaume Cerutti, le directeur général de la célèbre maison d'enchères, a eu le plus grand mal à dissimuler sa joie après avoir conclu ce qui peut être assimilé à la vente du siècle. Mercredi soir à New York, Salvator Mundi [sauveur du monde], la toile signée de la main du maître italien Léonard de Vincia été adjugée à 450,3 millions de dollars, soit 380 millions d'euros. Une somme record déboursée par un acheteur qui n'a pas souhaité, pour l'instant, dévoiler son identité.
Ce tableau, dont la vente a été actée après 19 minutes d'une rude bataille entre deux enchérisseurs, était détenue jusqu'ici par le milliardaire russe Dmitri Rybolovlev, un oligarque exilé qui préside par ailleurs le club de football de l'AS Monaco. La peinture en question représente le Christ, de face, effectuant le geste de la bénédiction de sa main droite et tenant une imposante boule de cristal dans son autre main. Avant la vente, Christie's avait estimé à 100 millions de dollars la valeur de cette toile de 65 cm sur 45 cm. Alors, comment expliquer une telle différence de prix?
"Personne, pas même les acteurs du marché de la peinture ancienne, ne s'attendait à un prix aussi faramineux", reconnaît Nicolas Joly, expert indépendant en tableaux anciens, encore estomaqué par cette acquisition record. Le spécialiste, qui voit cette vente comme un "épiphénomène", assure qu'elle n'a pas réellement d'explication logique. "C'est la magie des enchères! On touche ici à la passion, à l'intime d'un acheteur. Parfois, on peut se retrouver face à deux personnes qui sont fascinées par une oeuvre et qui vont entrer en compétition pour décrocher ce qui s'apparente à un trophée", poursuit l'expert qui a travaillé pendant près de 15 ans chez Sotheby's.
"Un morceau de l'histoire de l'art"
Pour Aude Fonlupt, commissaire-priseur, cette somme s'explique par la rareté de l'objet proposé. "Il y a très peu d'oeuvres reconnues de la main de Léonard de Vinci et surtout, il n'en restait qu'un appartenant à un collectionneur privé. Il faut bien se rendre compte que, mercredi, c'était la dernière occasion d'acquérir un morceau de l'histoire de l'art", tranche l'experte en art qui a exercé pendant cinq ans la fonction de commissaire-priseur au sein du prestigieux Hôtel Drouot. Selon elle, le nom de Léonard de Vinci suffit à déclencher les passions. "C'est une légende, un artiste iconique du marché de l'art. Posséder l'une de ses oeuvres représente l'apothéose pour n'importe quel collectionneur d'art", estime Aude Fonlupt. Le nouveau propriétaire "a acheté un nom, une image", reprend Nicolas Joly pour qui ce prix pharaonique de 450 millions de dollars représente "une côte artificielle ne correspondant pas à la valeur réelle de l'oeuvre".
Peinte au début des années 1500, cette toile a été vendue pour seulement 45 livres britanniques en 1958, avant d'être reconnue comme un authentique "Leonardo", en 2005. Bien que le tableau soit passé par la case restauration, il reste profondément abîmé. "L'état de conservation est médiocre. Seule l'une de ses mains est dans un état correct, le reste est usé, très fantomatique [...] Mais le nom de l'auteur fait rêver et certaines personnes sont prêtes à faire n'importe quoi pour avoir un Léonard de Vinci", détaille l'expert en tableaux anciens.
"Il pourrait s'agir d'une 'nouvelle fortune'"
Ce mauvais état de conservation n'a en tous cas pas effrayé l'acheteur. Ce dernier, qui n'était pas présent physiquement à la vente mercredi, a passé ses ordres par téléphone par le biais d'un vendeur de Christie's. "Je ne pense pas que ce soit un grand connaisseur de peintures anciennes. Si c'était le cas, il aurait tout de suite été freiné par l'état de conservation et aurait refusé de débourser une somme pareille", avance Nicolas Joly. Lors de la conférence de presse qui a suivi cette vente record, les responsables de Christie's ont refusé de donner toute information relative au nouveau propriétaire. Ce qui n'empêche pas les spéculations. "Il pourrait s'agir d'une 'nouvelle fortune' originaire du Moyen-Orient, de Russie ou d'Asie par exemple", observe l'expert indépendant.
Si le plus grand mystère entoure l'identité de l'acheteur, l'avenir du tableau reste lui aussi inconnu. Sera-t-il conservé à l'abri des regards ou exposé aux yeux de tous? "Pour l'instant, nous ne pouvons rien exclure. Il est possible que le collectionneur laisse le public profiter de son oeuvre dans une fondation ou décide de la laisser dans un coffre-fort", confie la commissaire-priseur Aude Fonlupt. "Tout dépend de la personnalité de l'acheteur. C'est un choix très personnel", conclut son confrère Nicolas Joly.
Salvator Mundi devance de loin les deux précédents tableaux, un De Kooning et un Gauguin, considérés jusqu'ici comme les plus onéreux au monde. Ils avaient été cédés en 2015 lors de ventes privées pour... 300 millions de dollars chacun.
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Salvator Mundi, un tableau de Lénoard de Vinci a trouvé preneur pour 450 millions de dollars, une somme record. Comment justifier un tel montant? Qu'a-t-il de si spécial? Décryptage.
"C'était un grand moment pour Christie's et, je crois, un grand moment pour le marché de l'art". Guillaume Cerutti, le directeur général de la célèbre maison d'enchères, a eu le plus grand mal à dissimuler sa joie après avoir conclu ce qui peut être assimilé à la vente du siècle. Mercredi soir à New York, Salvator Mundi [sauveur du monde], la toile signée de la main du maître italien Léonard de Vincia été adjugée à 450,3 millions de dollars, soit 380 millions d'euros. Une somme record déboursée par un acheteur qui n'a pas souhaité, pour l'instant, dévoiler son identité.
Ce tableau, dont la vente a été actée après 19 minutes d'une rude bataille entre deux enchérisseurs, était détenue jusqu'ici par le milliardaire russe Dmitri Rybolovlev, un oligarque exilé qui préside par ailleurs le club de football de l'AS Monaco. La peinture en question représente le Christ, de face, effectuant le geste de la bénédiction de sa main droite et tenant une imposante boule de cristal dans son autre main. Avant la vente, Christie's avait estimé à 100 millions de dollars la valeur de cette toile de 65 cm sur 45 cm. Alors, comment expliquer une telle différence de prix?
"Personne, pas même les acteurs du marché de la peinture ancienne, ne s'attendait à un prix aussi faramineux", reconnaît Nicolas Joly, expert indépendant en tableaux anciens, encore estomaqué par cette acquisition record. Le spécialiste, qui voit cette vente comme un "épiphénomène", assure qu'elle n'a pas réellement d'explication logique. "C'est la magie des enchères! On touche ici à la passion, à l'intime d'un acheteur. Parfois, on peut se retrouver face à deux personnes qui sont fascinées par une oeuvre et qui vont entrer en compétition pour décrocher ce qui s'apparente à un trophée", poursuit l'expert qui a travaillé pendant près de 15 ans chez Sotheby's.
"Un morceau de l'histoire de l'art"
Pour Aude Fonlupt, commissaire-priseur, cette somme s'explique par la rareté de l'objet proposé. "Il y a très peu d'oeuvres reconnues de la main de Léonard de Vinci et surtout, il n'en restait qu'un appartenant à un collectionneur privé. Il faut bien se rendre compte que, mercredi, c'était la dernière occasion d'acquérir un morceau de l'histoire de l'art", tranche l'experte en art qui a exercé pendant cinq ans la fonction de commissaire-priseur au sein du prestigieux Hôtel Drouot. Selon elle, le nom de Léonard de Vinci suffit à déclencher les passions. "C'est une légende, un artiste iconique du marché de l'art. Posséder l'une de ses oeuvres représente l'apothéose pour n'importe quel collectionneur d'art", estime Aude Fonlupt. Le nouveau propriétaire "a acheté un nom, une image", reprend Nicolas Joly pour qui ce prix pharaonique de 450 millions de dollars représente "une côte artificielle ne correspondant pas à la valeur réelle de l'oeuvre".
Peinte au début des années 1500, cette toile a été vendue pour seulement 45 livres britanniques en 1958, avant d'être reconnue comme un authentique "Leonardo", en 2005. Bien que le tableau soit passé par la case restauration, il reste profondément abîmé. "L'état de conservation est médiocre. Seule l'une de ses mains est dans un état correct, le reste est usé, très fantomatique [...] Mais le nom de l'auteur fait rêver et certaines personnes sont prêtes à faire n'importe quoi pour avoir un Léonard de Vinci", détaille l'expert en tableaux anciens.
"Il pourrait s'agir d'une 'nouvelle fortune'"
Ce mauvais état de conservation n'a en tous cas pas effrayé l'acheteur. Ce dernier, qui n'était pas présent physiquement à la vente mercredi, a passé ses ordres par téléphone par le biais d'un vendeur de Christie's. "Je ne pense pas que ce soit un grand connaisseur de peintures anciennes. Si c'était le cas, il aurait tout de suite été freiné par l'état de conservation et aurait refusé de débourser une somme pareille", avance Nicolas Joly. Lors de la conférence de presse qui a suivi cette vente record, les responsables de Christie's ont refusé de donner toute information relative au nouveau propriétaire. Ce qui n'empêche pas les spéculations. "Il pourrait s'agir d'une 'nouvelle fortune' originaire du Moyen-Orient, de Russie ou d'Asie par exemple", observe l'expert indépendant.
Si le plus grand mystère entoure l'identité de l'acheteur, l'avenir du tableau reste lui aussi inconnu. Sera-t-il conservé à l'abri des regards ou exposé aux yeux de tous? "Pour l'instant, nous ne pouvons rien exclure. Il est possible que le collectionneur laisse le public profiter de son oeuvre dans une fondation ou décide de la laisser dans un coffre-fort", confie la commissaire-priseur Aude Fonlupt. "Tout dépend de la personnalité de l'acheteur. C'est un choix très personnel", conclut son confrère Nicolas Joly.
Salvator Mundi devance de loin les deux précédents tableaux, un De Kooning et un Gauguin, considérés jusqu'ici comme les plus onéreux au monde. Ils avaient été cédés en 2015 lors de ventes privées pour... 300 millions de dollars chacun.
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