
LA LISTE DE LA MATINALE
Cette semaine, dans les salles, il y aura de l’action avec Laure Calamy, femme pressée dans A plein temps, du suspense avec Notre-Dame brûle, de l’histoire et des portraits avec deux beaux documentaires, L’Empire du silence et Funambules.
- A ne pas manquer
« A plein temps » : Laure Calamy en héroïne surmenée
C’est l’histoire d’une femme qui prend le RER, et c’est parfaitement addictif. Des grèves de transport généralisées viennent d’éclater, du sérieux comme en 1995, contraignant les Franciliens à échafauder des plans d’attaque pour éviter les bousculades, les faux départs et les retards. Ni de la ville ni de la campagne, Julie, mère de famille monoparentale, habite ce qu’on appelle une zone périurbaine et travaille à Paris, autrement dit la pire des situations quand le pays est paralysé.
Toute la journée, elle court : il lui faut déposer les enfants chez l’assistante maternelle, tenter d’attraper un train, se rendre dans le palace parisien où elle officie comme première femme de chambre, se déplacer à l’autre bout de la capitale pour passer un entretien d’embauche plus conforme à ses aspirations, rentrer chez elle, récupérer ses enfants avant que la nounou se fâche et la laisse tomber.
Doté d’une puissante ambition formelle qui lui a valu deux prix dans la sélection Orizzonti (meilleur réalisateur et meilleure actrice) à la Mostra de Venise 2021, le film nous fait littéralement vivre la course contre la montre à laquelle se livre quotidiennement Julie. Au choix classique de la musique électronique à tempo rapide d’Irène Drésel s’agrège une dimension plus inattendue, qui joue sur la réduction de notre champ de vision : dans les pas à vive allure de son héroïne, le film efface le décor autour, comme si l’on regardait perpétuellement à travers la vitre d’un train. Maroussia Dubreuil
« L’Empire du silence » : radiographie d’un pays en guerre
A 69 ans, le réalisateur belge Thierry Michel a bâti, au sein de son œuvre, une sorte de cathédrale filmique consacrée à l’actuelle République démocratique du Congo, ex-Congo belge. Ses quelque treize films, réalisés entre 1992 et 2022, constituent une incomparable radiographie politique, sociale et anthropologique de ce pays et des affres historiques qui l’ont tour à tour façonné et défiguré depuis la colonisation.
Vaste synthèse historique d’un pays en guerre depuis plus de deux décennies et qui n’aura cessé d’être saigné, au vu et au su du monde entier, ce film procède d’une dénonciation cinglante de ce scandale, d’une tentative de vaincre la loi du silence. L’interrogation fondamentale inlassablement croisée dans l’œuvre africaine de Thierry Michel est ici saisie à bras-le-corps : pourquoi ce pays grand comme l’Europe, aux ressources exceptionnelles en minerais, est-il l’un des plus pauvres du monde ? Et pourquoi l’état de guerre avérée ou larvée qui y sévit depuis près de trente ans et qui a fait des millions de morts ne fait-il l’objet d’aucune sanction internationale ? Il est à redouter que la réponse soit la plus cruelle que l’on puisse imaginer : parce que cela, directement ou indirectement, arrange tout le monde.
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« A plein temps » : Laure Calamy en héroïne surmenée
C’est l’histoire d’une femme qui prend le RER, et c’est parfaitement addictif. Des grèves de transport généralisées viennent d’éclater, du sérieux comme en 1995, contraignant les Franciliens à échafauder des plans d’attaque pour éviter les bousculades, les faux départs et les retards. Ni de la ville ni de la campagne, Julie, mère de famille monoparentale, habite ce qu’on appelle une zone périurbaine et travaille à Paris, autrement dit la pire des situations quand le pays est paralysé.
Toute la journée, elle court : il lui faut déposer les enfants chez l’assistante maternelle, tenter d’attraper un train, se rendre dans le palace parisien où elle officie comme première femme de chambre, se déplacer à l’autre bout de la capitale pour passer un entretien d’embauche plus conforme à ses aspirations, rentrer chez elle, récupérer ses enfants avant que la nounou se fâche et la laisse tomber.
Doté d’une puissante ambition formelle qui lui a valu deux prix dans la sélection Orizzonti (meilleur réalisateur et meilleure actrice) à la Mostra de Venise 2021, le film nous fait littéralement vivre la course contre la montre à laquelle se livre quotidiennement Julie. Au choix classique de la musique électronique à tempo rapide d’Irène Drésel s’agrège une dimension plus inattendue, qui joue sur la réduction de notre champ de vision : dans les pas à vive allure de son héroïne, le film efface le décor autour, comme si l’on regardait perpétuellement à travers la vitre d’un train. Maroussia Dubreuil
« L’Empire du silence » : radiographie d’un pays en guerre
A 69 ans, le réalisateur belge Thierry Michel a bâti, au sein de son œuvre, une sorte de cathédrale filmique consacrée à l’actuelle République démocratique du Congo, ex-Congo belge. Ses quelque treize films, réalisés entre 1992 et 2022, constituent une incomparable radiographie politique, sociale et anthropologique de ce pays et des affres historiques qui l’ont tour à tour façonné et défiguré depuis la colonisation.
Vaste synthèse historique d’un pays en guerre depuis plus de deux décennies et qui n’aura cessé d’être saigné, au vu et au su du monde entier, ce film procède d’une dénonciation cinglante de ce scandale, d’une tentative de vaincre la loi du silence. L’interrogation fondamentale inlassablement croisée dans l’œuvre africaine de Thierry Michel est ici saisie à bras-le-corps : pourquoi ce pays grand comme l’Europe, aux ressources exceptionnelles en minerais, est-il l’un des plus pauvres du monde ? Et pourquoi l’état de guerre avérée ou larvée qui y sévit depuis près de trente ans et qui a fait des millions de morts ne fait-il l’objet d’aucune sanction internationale ? Il est à redouter que la réponse soit la plus cruelle que l’on puisse imaginer : parce que cela, directement ou indirectement, arrange tout le monde.
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