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Convoi exceptionnel : critique en corbillard - EcranLarge.com - ÉcranLarge.com

LES CÔTELETTES SONT CUITES

Deux quidams, et à eux seuls une promesse, puisque les deux rôles principaux du film sont tenus par Christian Clavier et Gérard Depardieu. Soit un habitué de l’orfèvre Blier (c'est leur neuvième film ensemble), colosse du cinéma hexagonal devenu ogre en déshérence, et un bleu-bite, fantôme d’acteur comique à la carrière tumorale, en quête de rédemption filmique. À l’écran, dès la première image, le duo n’advient malheureusement jamais dans le cœur du spectateur.

photo, Gérard Depardieu, Christian Clavier Gérard Depardieu et Christian Clavier

Sitôt la première séquence et son jeu de piste méta (les héros courent après un scénario et ses auteurs omniscients), le constat est implacable. La mélodie Blier dissone, jamais les comédiens ne trouvent leur tempo, et les répliques claquent puis retombent, comme autant de balles tirées à blanc. Ni la poésie, ni la provocation, ni même l’irrésistible sensualité du verbe de Blier ne sont de la partie. Tout tourne à vide, et si la mort sature chaque scène de sa présence, ce n’est pas tant du fait de ses multiples incarnations au gré du scénario, mais bien par le vide qui préside au film.

Personnages et dialogues dévitalisés ne sont pas les seuls motifs de regretter la maestria passée du maître. D’ordinaire si chirurgical dans son découpage, capable de créer l’émotion dans le mouvement ténu d’un corps, d’habiller l’image d’une photographie complexe, l’artiste semble absent à lui-même. Image numérique baveuse, lumière d’un ennui pas si poli, montage ronronnant… Techniquement le film fait dans la relache embarrassante, piétinant l’héritage des Valseuses avec la grâce d’un gros intestin rompant soudain.

photo, Audrey Dana Audrey Dana, maîtrisse de cérémonie noire

LE PRURIT DES GLACONS

Pendant la majeure partie de ce Convoi exceptionnel, la putrescence attaque jusqu’à l’idée du cinéma de Blier. La misanthropie contrariée se fait bougonnerie gâteuse, la misogynie de façade se mue finalement en machisme recuit… Tous les affolants paradoxes de Calmos, Buffet froid ou Tenue de soirée se retrouvent ici sabrés, ramenés à de trop petits dénominateurs communs.

Et puis soudain, quand tout semble perdu, Alexandra Lamy entre en scène. Le temps d’une séquence, le temps d’évoquer un adultère par-delà la mort et une partouzerie endeuillée. Alors, le cadavre remue, Clavier s’exclame, et Depardieu émeut. Soudain, le réalisateur paraît retrouver des couleurs. Et le récit, qui commençait à sentir gentiment le natron, parvient de nouveau à gratter, dégueule de joie mauvaise, décoche quelques flèches poétiques et désenchantées, comme s’il lui était impossible de s’achever sur tant de médiocrité.

photo, Gérard Depardieu, Christian ClavierUn duo mal accordé...

Une bonne demi-heure de Blier excuse-t-elle 40 minutes de ratage total ? Valent-elles mieux que beaucoup de séances confortablement médiocres ? À chacun d’en décider. Mais quand s’amorce l’ultime mouvement de Convoi exceptionnel et que soudain les rôles s’inversent, on aura bien du mal à ne pas jouir, avec deux acteurs soudain brillants, de la poétique partition que leur offre le film avant de se taire.

En témoigne une incroyable scène finale, où Depardieu paraît lutter avec son oreillette, s'arrachant à des années de distanciation, pour renouer soudain avec l'acidité salvatrice d'un de ses pères de cinéma. Et quand l'artiste esquisse un demi-sourire d'assassin, c'est tout le film qui semble renaître.

Affiche

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Deux quidams, et à eux seuls une promesse, puisque les deux rôles principaux du film sont tenus par Christian Clavier et Gérard Depardieu. Soit un habitué de l’orfèvre Blier (c'est leur neuvième film ensemble), colosse du cinéma hexagonal devenu ogre en déshérence, et un bleu-bite, fantôme d’acteur comique à la carrière tumorale, en quête de rédemption filmique. À l’écran, dès la première image, le duo n’advient malheureusement jamais dans le cœur du spectateur.

photo, Gérard Depardieu, Christian Clavier Gérard Depardieu et Christian Clavier

Sitôt la première séquence et son jeu de piste méta (les héros courent après un scénario et ses auteurs omniscients), le constat est implacable. La mélodie Blier dissone, jamais les comédiens ne trouvent leur tempo, et les répliques claquent puis retombent, comme autant de balles tirées à blanc. Ni la poésie, ni la provocation, ni même l’irrésistible sensualité du verbe de Blier ne sont de la partie. Tout tourne à vide, et si la mort sature chaque scène de sa présence, ce n’est pas tant du fait de ses multiples incarnations au gré du scénario, mais bien par le vide qui préside au film.

Personnages et dialogues dévitalisés ne sont pas les seuls motifs de regretter la maestria passée du maître. D’ordinaire si chirurgical dans son découpage, capable de créer l’émotion dans le mouvement ténu d’un corps, d’habiller l’image d’une photographie complexe, l’artiste semble absent à lui-même. Image numérique baveuse, lumière d’un ennui pas si poli, montage ronronnant… Techniquement le film fait dans la relache embarrassante, piétinant l’héritage des Valseuses avec la grâce d’un gros intestin rompant soudain.

photo, Audrey Dana Audrey Dana, maîtrisse de cérémonie noire

LE PRURIT DES GLACONS

Pendant la majeure partie de ce Convoi exceptionnel, la putrescence attaque jusqu’à l’idée du cinéma de Blier. La misanthropie contrariée se fait bougonnerie gâteuse, la misogynie de façade se mue finalement en machisme recuit… Tous les affolants paradoxes de Calmos, Buffet froid ou Tenue de soirée se retrouvent ici sabrés, ramenés à de trop petits dénominateurs communs.

Et puis soudain, quand tout semble perdu, Alexandra Lamy entre en scène. Le temps d’une séquence, le temps d’évoquer un adultère par-delà la mort et une partouzerie endeuillée. Alors, le cadavre remue, Clavier s’exclame, et Depardieu émeut. Soudain, le réalisateur paraît retrouver des couleurs. Et le récit, qui commençait à sentir gentiment le natron, parvient de nouveau à gratter, dégueule de joie mauvaise, décoche quelques flèches poétiques et désenchantées, comme s’il lui était impossible de s’achever sur tant de médiocrité.

photo, Gérard Depardieu, Christian ClavierUn duo mal accordé...

Une bonne demi-heure de Blier excuse-t-elle 40 minutes de ratage total ? Valent-elles mieux que beaucoup de séances confortablement médiocres ? À chacun d’en décider. Mais quand s’amorce l’ultime mouvement de Convoi exceptionnel et que soudain les rôles s’inversent, on aura bien du mal à ne pas jouir, avec deux acteurs soudain brillants, de la poétique partition que leur offre le film avant de se taire.

En témoigne une incroyable scène finale, où Depardieu paraît lutter avec son oreillette, s'arrachant à des années de distanciation, pour renouer soudain avec l'acidité salvatrice d'un de ses pères de cinéma. Et quand l'artiste esquisse un demi-sourire d'assassin, c'est tout le film qui semble renaître.

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