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Sylvie Tellier : «Je me sens libérée» - Paris Match

Pendant dix-sept ans, elle a régné sur le concours des Miss France. Pour Paris Match, elle explique les vraies raisons de son départ.

Paris Match. Ainsi, un matin, on se réveille et, après dix-sept ans à servir Miss France, on se dit “j’arrête” ?
Sylvie Tellier.
Cela n’a pas été brutal : on ne part pas sans avoir mûrement réfléchi. Le confinement, la disparition de Jean-Pierre Pernaut, un septième changement de présidence, la conjonction de ces facteurs important m’a amenée à tirer mon propre bilan. J’avais le sentiment d’avoir fait le tour et, surtout, d’avoir atteint mes objectifs. J’estimais qu’il était temps d’écrire une autre page de ma vie de chef d’entreprise, et j’ai foncé. 

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Sans regrets ?
Sur mon départ, c’est sans regrets, vraiment. Pour le reste, j’en ai quelques-uns. J’ai certainement commis des erreurs de management, qu’on fait toutes quand on est débutantes, peut-être froissé des gens… C’est ainsi, je n’en ai toujours fait qu’à ma tête. Mais j’ai été très gâtée, j’ai eu la chance de travailler avec des gens fantastiques. Une seule chose me peine : qu’on parle davantage de mon départ que de celui de Diane Leyre qui vient de rendre sa couronne. On lui a un peu volé son moment, mais je trouverai le moyen, un jour, de mettre cette fille formidable à l’honneur. 

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Vous ne vous sentez pas un peu orpheline ? 
Je me sens libérée ! Je ne m’attendais pas à autant de messages d’amour, de gens qui me disent : “Merci”, “Ne t’en va pas”… Ça fait du bien, ça aide. J’ai décidé de partir il y a trois mois, et toujours pas de coup de blues à l’horizon. Bien sûr, j’ai eu du mal à quitter mon équipe. Mais, après deux plans sociaux, j’en avais déjà perdu une bonne partie. La disparition de Jean-Pierre Pernaut en début d’année a aussi été un autre tournant. Il était un pilier ; à la moindre question, je l’appelais. Il était toujours de bon conseil. Je l’entends encore dire : “Sois toujours fière de tes convictions !” 

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Les nouvelles règles, j’adhérais à certaines, à d’autres moins, je ne m’en suis pas cachée.


Pernaut disparu, il reste encore Jean-Pierre Foucault… 
Lui, c’est mon papa de télévision, il m’a tout appris et était là quand j’ai été élue, en 2001. Mon départ a été l’occasion de lui exprimer la gratitude, l’affection et l’admiration que j’ai pour lui. 


Quelle incidence a eue, dans votre décision, le dernier changement de présidence ? 
Qui dit changement de présidence dit changement de stratégie, de règles du concours. J’adhérais à certaines, à d’autres moins, je ne m’en suis pas cachée. Notamment celle d’accepter les candidatures de mamans. Parce que je le suis, je sais que le planning d’une Miss France est difficilement conciliable avec une vie de mère. Mais peut-être que ça le deviendra, et ce sera bien ainsi. Chaque nouvelle équipe apporte du sang neuf, sa patte, une dynamique, et ça a du bon. Je souhaite beaucoup de courage à Alexia Laroche-Joubert et à Cindy Fabre pour porter haut cette marque fantastique à laquelle les Français sont si attachés.

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Premières vacances de l’après-règne. Oubliées les querelles autour de Miss France…

Premières vacances de l’après-règne. Oubliées les querelles autour de Miss France… Bestimage / © Jack Tribeca


Peut-on révolutionner les Miss France ? 
On peut les faire évoluer avec leur temps. Une des premières choses que j’ai faites était d’ailleurs d’autoriser les défilés en maillot deux pièces. À l’époque, les candidates n’avaient même pas le droit de se colorer les cheveux ! Mais attention, à force de liberté, on va parfois à l’encontre de certaines valeurs. Miss France doit rester un concours de beauté. Je ne veux pas en dire plus. Quand Geneviève de Fontenay est partie, elle a mis un certain temps à couper le cordon, ce dont j’ai souffert. J’ai donc décidé de m’abstenir de tout commentaire à l’avenir. 


Qu’êtes-vous fière d’avoir fait pour nos Miss ? 
Quand je suis arrivée, en 2005, c’était un challenge. Miss France était une très petite société et se résumait à une seule et même personne : Geneviève de Fontenay. Il fallait redresser l’audience, moderniser le programme, valoriser la marque, inventer une nouvelle économie en trouvant des partenaires, ce que j’ai fait. Et on a réussi à attirer un public plus jeune, tout en préservant l’institution. Nous n’avions aucune visibilité internationale. J’amenais les filles au concours de Miss Univers, sachant qu’aucune ne parviendrait au classement. À force de lobbying, Iris Mittenaere est devenue Miss Univers, et nous avons eu deux titres de première dauphine au concours de Miss Monde… À mon époque, on reconnaissait une Miss France seulement grâce à son écharpe, sans savoir qui elle était vraiment. Les Miss élues ces dix-sept dernières années sont devenues de vraies ambassadrices, chefs d’entreprise, animatrices télé ou radio, elles forment une incroyable famille. Je suis particulièrement fière de cela, comme de rester présidente des Bonnes Fées, cette association que j’ai créée il y a sept ans, parce que la présidence d’alors n’avait pas voulu me suivre dans un projet de fondation Miss France. J’étais en congé maternité à la maison, je tournais en rond, alors j’ai appelé toutes les copines ex-Miss pour leur proposer de mettre notre notoriété au profit de celles qui en ont besoin. Depuis, on a ouvert des maisons dans des centres de cancérologie, et même dans les déserts médicaux, pour offrir aux femmes des ateliers de thérapies complémentaires : massages, coiffures, perruques contre l’alopécie, tatouages réparateurs. 

La compétition continue, à coups de boules de neige ou de pêche au gros.

La compétition continue, à coups de boules de neige ou de pêche au gros. Bestimage / © Jack Tribeca


Vous parliez du confinement, vous a-t-il donné envie de passer plus de temps auprès de votre famille ? 
Je n’ai pas vécu Miss France comme un métier, mais comme une passion. Je m’y suis tellement impliquée que tout le monde pensait – et peut-être est-ce pour cela qu’il y a aujourd’hui autant de polémiques – que c’était ma société. J’étais piquée à Miss France 365 jours sur 365. J’ai trois enfants, je suis dynamique, mais j’avoue m’être dit pendant le Covid : “Waouh, quel bonheur d’avoir de vrais week-ends !” J’étais arrivée au bout de mes sacrifices pour une société qui ne m’appartenait pas. Aujourd’hui, j’ai envie de préserver davantage ma famille. 

Jean-Pierre Pernaut aimait la France, il aimait l’excellence. Je me sens, dans ce domaine, un peu son héritière


Votre rôle de consultante auprès de Miss France s’est achevé lors de l’élection du 17 décembre. Allez-vous vous accorder quelques mois sabbatiques avant de reprendre une activité ? 
Non. Je redémarre direct avec Made in Excellence, la structure que j’ai créé. Ce que je vais faire sera au carrefour de tout ce que j’ai aimé : les gens, les régions, la France, le business. Même si je suis impatiente, je prendrai le temps nécessaire pour mettre mon expérience, mon réseau, mes accès aux médias à disposition des institutions, des politiques, des entreprises qui font le succès de la France. Nous avons plein de savoir-faire ignorés faute de compétence pour en parler. Quand on est une femme de 40 ans, on sait que l’on n’a pas dix vies professionnelles devant soi. J’ai envie de me donner toutes les chances de réussir, mais aussi de continuer à faire ce que j’aime par-dessus tout : de la production et de l’animation télé. D’ailleurs le 14 janvier, je commenterai, en direct, l’élection de Miss Univers sur Paris Première. 


C’est un peu ce que Jean-Pierre Pernaut avait commencé à faire après son départ de TF1 ? 
Jean-Pierre aimait la France, il aimait l’excellence. Je me sens, dans ce domaine, un peu son héritière. 

Premier bonhomme de neige de la saison avec ses deux cadets.

Premier bonhomme de neige de la saison avec ses deux cadets. Bestimage / © Jack Tribeca


Êtes-vous toujours en contact avec son épouse, Nathalie Marquay ? 
Bien sûr. Nous avons un lien particulier ; Nathalie et Jean-Pierre se sont rencontrés le jour de mon élection, il y a vingt et un ans, et elle accouchait de son premier enfant le jour où je rendais mon titre… Nous sommes une vraie famille.


Passer plus de temps avec la vôtre est une priorité ? 
Je crois que c’est la première fois en dix-sept ans que j’ai pu organiser des vacances de Noël ! Je ne compte pas les fois où j’ai dit à mon mari : “Partez, je vous rejoindrai…” Parce que, une fois Miss France élue, si elle est tahitienne, il faut aller à Tahiti, si elle est guyanaise, il faut aller en Guyane… Et enchaîner une semaine d’interviews. Généralement, j’arrivais le 24 décembre usée, fatiguée, avec 5 kilos de moins, sans avoir eu le temps de faire des cadeaux. En fait, ce n’est pas passer plus de temps avec mes enfants qui me manque, mais c’est de passer avec eux un temps plus calme, plus serein. Je ne dois pas être la seule, plein de femmes travaillent, courent, et je continuerai sûrement à le faire, mais peut-être moins vite. 

“Mais enfin, tu te rends compte, tu quittes un salaire, une position, un statut”, m’a dit ma mère, un peu catastrophée


Comment ont-ils vécu le fait que vous arrêtiez ? 
Mon mari et le petit dernier, évidemment, étaient très contents. Mais mon fils aîné qui a 12 ans et sa sœur qui en a 8, pas du tout, alors que je pensais qu’ils allaient hurler de joie ! Ils voulaient savoir s’ils continueraient à voir les Miss, qu’ils adorent, chacun pour des raisons différentes. [Rires.] Il a fallu que je les rassure en leur expliquant que je garde un pied dans la famille Miss France. Alexia Laroche-Joubert m’a nommée présidente d’honneur, un cadeau pour dix-sept ans de bons et loyaux services. “Mais enfin, tu te rends compte, tu quittes un salaire, une position, un statut”, m’a dit ma mère, un peu catastrophée. Elle avait 40 ans quand elle a divorcé, pour nous élever seule, mes sœurs et moi. Elle était au chômage et nous a tout donné, vraiment tout. Elle est de cette génération où l’on ne quittait pas la proie pour l’ombre. Moi, au contraire, je suis de celles qui osent changer de vie. Sur les réseaux sociaux, je reçois de nombreux messages de femmes qui me disent : “Si j’avais votre courage…” C’est vrai que ça donne un peu le tournis d’abandonner tout cela. J’aurais pu rester plan-plan jusqu’à la fin de mes jours, mais j’avais envie de les pimenter un peu. Voilà, c’est fait. Prendre un risque est excitant. Je suis motivée, et je sais que ça va fonctionner, pas par prétention, mais parce que je suis forte de toutes les recettes appliquées chez Miss France. 

Devant une œuvre de Leloluce, qui figure dans le top 100 des artistes contemporains internationaux, et que Sylvie Tellier entend «mettre en lumière» avec sa nouvelle société. E

Devant une œuvre de Leloluce, qui figure dans le top 100 des artistes contemporains internationaux, et que Sylvie Tellier entend «mettre en lumière» avec sa nouvelle société. E Bestimage / © Jack Tribeca


Vous avez besoin de travailler ? 
On a tous besoin de travailler. C’est une nécessité financière, mais c’est surtout pour ce rapport aux autres qui fait que je me sens vivante. 

Quand Iris Mittenaere a été couronnée Miss Univers, on aurait mis la couronne sur ma tête, je n’aurais pas été plus heureuse !


En dehors de votre élection, quel est le souvenir à retenir de votre carrière auprès des Miss ? 
Il y en a mille… Je me revois, par exemple, à 7 heures du matin, heure française, à Manille, quand Iris Mittenaere a été couronnée Miss Univers. On aurait mis la couronne sur ma tête, je n’aurais pas été plus heureuse ! Cette victoire était l’aboutissement de onze ans de lobbying auprès des organisateurs des concours internationaux. Faire gagner une femme de 1,72 mètre, qui n’avait jamais eu recours à la chirurgie esthétique et parlait de bœuf bourguignon, juste par la volonté et son charisme, était une gageure. Il y a aussi ce jour où je me suis retrouvée avec Chloé Mortaud à l’investiture de Barack Obama. C’était son rêve, et je n’avais a priori ni les moyens ni les réseaux pour le concrétiser. Mais je ne me suis pas dégonflée. J’ai appelé l’amie d’une amie de l’époque de la faculté, elle a proposé de nous héberger à Washington. Et on s’est débrouillées. J’ai réveillé Chloé à 4 heures du matin, je lui ai mis des chaufferettes dans les Moon Boot et, comme tous les Américains sans accréditation, nous avons marché des heures pour accéder à l’esplanade où avait lieu la cérémonie. Une fois entrées, on a retrouvé nos amis de TF1 qui faisaient un duplex pour le JT de 13 heures. Je me souviens de Chloé pleurant d’émotion devant Obama, car cette élection représentait tellement pour elle… J’en ai des frissons. Il y a aussi cette fois où, avec Laurie Thilleman – bretonne, dont le père était dans les commandos de marine –, nous nous sommes retrouvées à plat ventre, en uniforme, à bord d’un avion ravitailleur sur la base militaire d’Istres. On voyait les Mirage accoster à toute vitesse. J’ai vécu tellement de belles choses auxquelles personne n’a accès. On pourrait écrire un livre !

dans le cocon enchanté de l’hôtel Annapurna de Courchevel, le palace de la famille Pinturault, où a eu lieu le vernissage de la peintre et sculptrice savoyarde.

dans le cocon enchanté de l’hôtel Annapurna de Courchevel, le palace de la famille Pinturault, où a eu lieu le vernissage de la peintre et sculptrice savoyarde. Bestimage / © Jack Tribeca


Vous lancer en politique pourrait vous tenter ? 
Je m’y intéresse et fréquente les politiques, parce qu’ils peuvent nous aider à valoriser le savoir-faire français, l’artisanat d’excellence, le tourisme, mais pas assez pour envisager d’en faire une carrière… Je sais que c’est un métier qui ne s’improvise pas, et un sujet qui divise. 


Vous avez déjà été approchée par des partis ? 
Oui, comme tant de monde. 

Pour moi, tu es Miss France 365 jours par an, 24 heures sur 24, et tu dois être nickel


L’émergence des extrêmes pourrait vous donner envie de franchir le pas ? 
Je ne suis pas persuadée que les Français attendent de moi que je prenne parti. Quand je sortais mon drapeau bleu-blanc-rouge au concours de Miss Univers et que l’on me disait “Sylvie, attention FN”, je rigolais. Ce drapeau n’appartient pas à un parti, il m’appartient à moi, citoyenne française. C’est mon drapeau, je l’aime. Nous les artistes avons le devoir, il me semble, de soutenir le gouvernement élu. Que cela corresponde ou non à nos orientations. 


Vous aviez la réputation d’être une directrice exigeante. Pourquoi ? 
Avec chaque Miss France, je crois avoir été juste. Même si je respectais leur intimité. Pour moi, tu es Miss France 365 jours par an, 24 heures sur 24, et tu dois être nickel, disponible, en représentation permanente. J’en ai repris certaines qui refusaient de faire des photos, au nom du fait qu’on ne peut pas décevoir ne serait-ce qu’une petite fille dont on croise la route de manière impromptue. Et ça m’a valu une réputation de femme de caractère. Cette exigence, je l’avais aussi pour moi-même. 

En Guadeloupe, tout le monde s’attendait à ce que je pleure. Mais cela n’est arrivé qu’une fois, lors de la soirée organisée par mes équipes


Être présente lors des sélections en Guadeloupe, puis à l’élection à Châteauroux, le 17 décembre, a-t-il été difficile pour vous, émotionnellement ? 
En Guadeloupe, tout le monde s’attendait à ce que je pleure. Mais cela n’est arrivé qu’une fois, lors de la soirée organisée par mes équipes. C’est évidemment un peu bizarre de se retrouver spectatrice de ce que tu as mis en place avec tes partenaires. J’y suis allée pour les remercier, et passer le flambeau à Cindy Fabre, le plus discrètement possible. Au temps de mon élection, nous n’avions pas les moyens de payer des places à 1 000 francs pour que tout le monde assiste à la finale. Seule ma mère avait pu venir, et mes deux sœurs m’en ont longtemps voulu de les avoir privées de cette victoire. Pour mon départ, toutes étaient là à Châteauroux, avec mon mari, nos trois enfants, et je me suis laissé submerger par l’émotion au moment de les remercier. Toutes ces fêtes, ces anniversaires, ces vacances où je les ai rejoints au dernier moment et que j’ai manqués parfois ou passés pendue au téléphone à régler des problèmes de Miss… Ils ont fait beaucoup de sacrifices pour me laisser exercer ma passion, tout en m’offrant d’être une épouse et une maman épanouie. Au fond, je pense qu’ils savent que je serais incapable d’exceller comme femme au foyer ! 

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Pendant dix-sept ans, elle a régné sur le concours des Miss France. Pour Paris Match, elle explique les vraies raisons de son départ.

Paris Match. Ainsi, un matin, on se réveille et, après dix-sept ans à servir Miss France, on se dit “j’arrête” ?
Sylvie Tellier.
Cela n’a pas été brutal : on ne part pas sans avoir mûrement réfléchi. Le confinement, la disparition de Jean-Pierre Pernaut, un septième changement de présidence, la conjonction de ces facteurs important m’a amenée à tirer mon propre bilan. J’avais le sentiment d’avoir fait le tour et, surtout, d’avoir atteint mes objectifs. J’estimais qu’il était temps d’écrire une autre page de ma vie de chef d’entreprise, et j’ai foncé. 

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Sur mon départ, c’est sans regrets, vraiment. Pour le reste, j’en ai quelques-uns. J’ai certainement commis des erreurs de management, qu’on fait toutes quand on est débutantes, peut-être froissé des gens… C’est ainsi, je n’en ai toujours fait qu’à ma tête. Mais j’ai été très gâtée, j’ai eu la chance de travailler avec des gens fantastiques. Une seule chose me peine : qu’on parle davantage de mon départ que de celui de Diane Leyre qui vient de rendre sa couronne. On lui a un peu volé son moment, mais je trouverai le moyen, un jour, de mettre cette fille formidable à l’honneur. 

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Vous ne vous sentez pas un peu orpheline ? 
Je me sens libérée ! Je ne m’attendais pas à autant de messages d’amour, de gens qui me disent : “Merci”, “Ne t’en va pas”… Ça fait du bien, ça aide. J’ai décidé de partir il y a trois mois, et toujours pas de coup de blues à l’horizon. Bien sûr, j’ai eu du mal à quitter mon équipe. Mais, après deux plans sociaux, j’en avais déjà perdu une bonne partie. La disparition de Jean-Pierre Pernaut en début d’année a aussi été un autre tournant. Il était un pilier ; à la moindre question, je l’appelais. Il était toujours de bon conseil. Je l’entends encore dire : “Sois toujours fière de tes convictions !” 

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Les nouvelles règles, j’adhérais à certaines, à d’autres moins, je ne m’en suis pas cachée.


Pernaut disparu, il reste encore Jean-Pierre Foucault… 
Lui, c’est mon papa de télévision, il m’a tout appris et était là quand j’ai été élue, en 2001. Mon départ a été l’occasion de lui exprimer la gratitude, l’affection et l’admiration que j’ai pour lui. 


Quelle incidence a eue, dans votre décision, le dernier changement de présidence ? 
Qui dit changement de présidence dit changement de stratégie, de règles du concours. J’adhérais à certaines, à d’autres moins, je ne m’en suis pas cachée. Notamment celle d’accepter les candidatures de mamans. Parce que je le suis, je sais que le planning d’une Miss France est difficilement conciliable avec une vie de mère. Mais peut-être que ça le deviendra, et ce sera bien ainsi. Chaque nouvelle équipe apporte du sang neuf, sa patte, une dynamique, et ça a du bon. Je souhaite beaucoup de courage à Alexia Laroche-Joubert et à Cindy Fabre pour porter haut cette marque fantastique à laquelle les Français sont si attachés.

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Premières vacances de l’après-règne. Oubliées les querelles autour de Miss France…

Premières vacances de l’après-règne. Oubliées les querelles autour de Miss France… Bestimage / © Jack Tribeca


Peut-on révolutionner les Miss France ? 
On peut les faire évoluer avec leur temps. Une des premières choses que j’ai faites était d’ailleurs d’autoriser les défilés en maillot deux pièces. À l’époque, les candidates n’avaient même pas le droit de se colorer les cheveux ! Mais attention, à force de liberté, on va parfois à l’encontre de certaines valeurs. Miss France doit rester un concours de beauté. Je ne veux pas en dire plus. Quand Geneviève de Fontenay est partie, elle a mis un certain temps à couper le cordon, ce dont j’ai souffert. J’ai donc décidé de m’abstenir de tout commentaire à l’avenir. 


Qu’êtes-vous fière d’avoir fait pour nos Miss ? 
Quand je suis arrivée, en 2005, c’était un challenge. Miss France était une très petite société et se résumait à une seule et même personne : Geneviève de Fontenay. Il fallait redresser l’audience, moderniser le programme, valoriser la marque, inventer une nouvelle économie en trouvant des partenaires, ce que j’ai fait. Et on a réussi à attirer un public plus jeune, tout en préservant l’institution. Nous n’avions aucune visibilité internationale. J’amenais les filles au concours de Miss Univers, sachant qu’aucune ne parviendrait au classement. À force de lobbying, Iris Mittenaere est devenue Miss Univers, et nous avons eu deux titres de première dauphine au concours de Miss Monde… À mon époque, on reconnaissait une Miss France seulement grâce à son écharpe, sans savoir qui elle était vraiment. Les Miss élues ces dix-sept dernières années sont devenues de vraies ambassadrices, chefs d’entreprise, animatrices télé ou radio, elles forment une incroyable famille. Je suis particulièrement fière de cela, comme de rester présidente des Bonnes Fées, cette association que j’ai créée il y a sept ans, parce que la présidence d’alors n’avait pas voulu me suivre dans un projet de fondation Miss France. J’étais en congé maternité à la maison, je tournais en rond, alors j’ai appelé toutes les copines ex-Miss pour leur proposer de mettre notre notoriété au profit de celles qui en ont besoin. Depuis, on a ouvert des maisons dans des centres de cancérologie, et même dans les déserts médicaux, pour offrir aux femmes des ateliers de thérapies complémentaires : massages, coiffures, perruques contre l’alopécie, tatouages réparateurs. 

La compétition continue, à coups de boules de neige ou de pêche au gros.

La compétition continue, à coups de boules de neige ou de pêche au gros. Bestimage / © Jack Tribeca


Vous parliez du confinement, vous a-t-il donné envie de passer plus de temps auprès de votre famille ? 
Je n’ai pas vécu Miss France comme un métier, mais comme une passion. Je m’y suis tellement impliquée que tout le monde pensait – et peut-être est-ce pour cela qu’il y a aujourd’hui autant de polémiques – que c’était ma société. J’étais piquée à Miss France 365 jours sur 365. J’ai trois enfants, je suis dynamique, mais j’avoue m’être dit pendant le Covid : “Waouh, quel bonheur d’avoir de vrais week-ends !” J’étais arrivée au bout de mes sacrifices pour une société qui ne m’appartenait pas. Aujourd’hui, j’ai envie de préserver davantage ma famille. 

Jean-Pierre Pernaut aimait la France, il aimait l’excellence. Je me sens, dans ce domaine, un peu son héritière


Votre rôle de consultante auprès de Miss France s’est achevé lors de l’élection du 17 décembre. Allez-vous vous accorder quelques mois sabbatiques avant de reprendre une activité ? 
Non. Je redémarre direct avec Made in Excellence, la structure que j’ai créé. Ce que je vais faire sera au carrefour de tout ce que j’ai aimé : les gens, les régions, la France, le business. Même si je suis impatiente, je prendrai le temps nécessaire pour mettre mon expérience, mon réseau, mes accès aux médias à disposition des institutions, des politiques, des entreprises qui font le succès de la France. Nous avons plein de savoir-faire ignorés faute de compétence pour en parler. Quand on est une femme de 40 ans, on sait que l’on n’a pas dix vies professionnelles devant soi. J’ai envie de me donner toutes les chances de réussir, mais aussi de continuer à faire ce que j’aime par-dessus tout : de la production et de l’animation télé. D’ailleurs le 14 janvier, je commenterai, en direct, l’élection de Miss Univers sur Paris Première. 


C’est un peu ce que Jean-Pierre Pernaut avait commencé à faire après son départ de TF1 ? 
Jean-Pierre aimait la France, il aimait l’excellence. Je me sens, dans ce domaine, un peu son héritière. 

Premier bonhomme de neige de la saison avec ses deux cadets.

Premier bonhomme de neige de la saison avec ses deux cadets. Bestimage / © Jack Tribeca


Êtes-vous toujours en contact avec son épouse, Nathalie Marquay ? 
Bien sûr. Nous avons un lien particulier ; Nathalie et Jean-Pierre se sont rencontrés le jour de mon élection, il y a vingt et un ans, et elle accouchait de son premier enfant le jour où je rendais mon titre… Nous sommes une vraie famille.


Passer plus de temps avec la vôtre est une priorité ? 
Je crois que c’est la première fois en dix-sept ans que j’ai pu organiser des vacances de Noël ! Je ne compte pas les fois où j’ai dit à mon mari : “Partez, je vous rejoindrai…” Parce que, une fois Miss France élue, si elle est tahitienne, il faut aller à Tahiti, si elle est guyanaise, il faut aller en Guyane… Et enchaîner une semaine d’interviews. Généralement, j’arrivais le 24 décembre usée, fatiguée, avec 5 kilos de moins, sans avoir eu le temps de faire des cadeaux. En fait, ce n’est pas passer plus de temps avec mes enfants qui me manque, mais c’est de passer avec eux un temps plus calme, plus serein. Je ne dois pas être la seule, plein de femmes travaillent, courent, et je continuerai sûrement à le faire, mais peut-être moins vite. 

“Mais enfin, tu te rends compte, tu quittes un salaire, une position, un statut”, m’a dit ma mère, un peu catastrophée


Comment ont-ils vécu le fait que vous arrêtiez ? 
Mon mari et le petit dernier, évidemment, étaient très contents. Mais mon fils aîné qui a 12 ans et sa sœur qui en a 8, pas du tout, alors que je pensais qu’ils allaient hurler de joie ! Ils voulaient savoir s’ils continueraient à voir les Miss, qu’ils adorent, chacun pour des raisons différentes. [Rires.] Il a fallu que je les rassure en leur expliquant que je garde un pied dans la famille Miss France. Alexia Laroche-Joubert m’a nommée présidente d’honneur, un cadeau pour dix-sept ans de bons et loyaux services. “Mais enfin, tu te rends compte, tu quittes un salaire, une position, un statut”, m’a dit ma mère, un peu catastrophée. Elle avait 40 ans quand elle a divorcé, pour nous élever seule, mes sœurs et moi. Elle était au chômage et nous a tout donné, vraiment tout. Elle est de cette génération où l’on ne quittait pas la proie pour l’ombre. Moi, au contraire, je suis de celles qui osent changer de vie. Sur les réseaux sociaux, je reçois de nombreux messages de femmes qui me disent : “Si j’avais votre courage…” C’est vrai que ça donne un peu le tournis d’abandonner tout cela. J’aurais pu rester plan-plan jusqu’à la fin de mes jours, mais j’avais envie de les pimenter un peu. Voilà, c’est fait. Prendre un risque est excitant. Je suis motivée, et je sais que ça va fonctionner, pas par prétention, mais parce que je suis forte de toutes les recettes appliquées chez Miss France. 

Devant une œuvre de Leloluce, qui figure dans le top 100 des artistes contemporains internationaux, et que Sylvie Tellier entend «mettre en lumière» avec sa nouvelle société. E

Devant une œuvre de Leloluce, qui figure dans le top 100 des artistes contemporains internationaux, et que Sylvie Tellier entend «mettre en lumière» avec sa nouvelle société. E Bestimage / © Jack Tribeca


Vous avez besoin de travailler ? 
On a tous besoin de travailler. C’est une nécessité financière, mais c’est surtout pour ce rapport aux autres qui fait que je me sens vivante. 

Quand Iris Mittenaere a été couronnée Miss Univers, on aurait mis la couronne sur ma tête, je n’aurais pas été plus heureuse !


En dehors de votre élection, quel est le souvenir à retenir de votre carrière auprès des Miss ? 
Il y en a mille… Je me revois, par exemple, à 7 heures du matin, heure française, à Manille, quand Iris Mittenaere a été couronnée Miss Univers. On aurait mis la couronne sur ma tête, je n’aurais pas été plus heureuse ! Cette victoire était l’aboutissement de onze ans de lobbying auprès des organisateurs des concours internationaux. Faire gagner une femme de 1,72 mètre, qui n’avait jamais eu recours à la chirurgie esthétique et parlait de bœuf bourguignon, juste par la volonté et son charisme, était une gageure. Il y a aussi ce jour où je me suis retrouvée avec Chloé Mortaud à l’investiture de Barack Obama. C’était son rêve, et je n’avais a priori ni les moyens ni les réseaux pour le concrétiser. Mais je ne me suis pas dégonflée. J’ai appelé l’amie d’une amie de l’époque de la faculté, elle a proposé de nous héberger à Washington. Et on s’est débrouillées. J’ai réveillé Chloé à 4 heures du matin, je lui ai mis des chaufferettes dans les Moon Boot et, comme tous les Américains sans accréditation, nous avons marché des heures pour accéder à l’esplanade où avait lieu la cérémonie. Une fois entrées, on a retrouvé nos amis de TF1 qui faisaient un duplex pour le JT de 13 heures. Je me souviens de Chloé pleurant d’émotion devant Obama, car cette élection représentait tellement pour elle… J’en ai des frissons. Il y a aussi cette fois où, avec Laurie Thilleman – bretonne, dont le père était dans les commandos de marine –, nous nous sommes retrouvées à plat ventre, en uniforme, à bord d’un avion ravitailleur sur la base militaire d’Istres. On voyait les Mirage accoster à toute vitesse. J’ai vécu tellement de belles choses auxquelles personne n’a accès. On pourrait écrire un livre !

dans le cocon enchanté de l’hôtel Annapurna de Courchevel, le palace de la famille Pinturault, où a eu lieu le vernissage de la peintre et sculptrice savoyarde.

dans le cocon enchanté de l’hôtel Annapurna de Courchevel, le palace de la famille Pinturault, où a eu lieu le vernissage de la peintre et sculptrice savoyarde. Bestimage / © Jack Tribeca


Vous lancer en politique pourrait vous tenter ? 
Je m’y intéresse et fréquente les politiques, parce qu’ils peuvent nous aider à valoriser le savoir-faire français, l’artisanat d’excellence, le tourisme, mais pas assez pour envisager d’en faire une carrière… Je sais que c’est un métier qui ne s’improvise pas, et un sujet qui divise. 


Vous avez déjà été approchée par des partis ? 
Oui, comme tant de monde. 

Pour moi, tu es Miss France 365 jours par an, 24 heures sur 24, et tu dois être nickel


L’émergence des extrêmes pourrait vous donner envie de franchir le pas ? 
Je ne suis pas persuadée que les Français attendent de moi que je prenne parti. Quand je sortais mon drapeau bleu-blanc-rouge au concours de Miss Univers et que l’on me disait “Sylvie, attention FN”, je rigolais. Ce drapeau n’appartient pas à un parti, il m’appartient à moi, citoyenne française. C’est mon drapeau, je l’aime. Nous les artistes avons le devoir, il me semble, de soutenir le gouvernement élu. Que cela corresponde ou non à nos orientations. 


Vous aviez la réputation d’être une directrice exigeante. Pourquoi ? 
Avec chaque Miss France, je crois avoir été juste. Même si je respectais leur intimité. Pour moi, tu es Miss France 365 jours par an, 24 heures sur 24, et tu dois être nickel, disponible, en représentation permanente. J’en ai repris certaines qui refusaient de faire des photos, au nom du fait qu’on ne peut pas décevoir ne serait-ce qu’une petite fille dont on croise la route de manière impromptue. Et ça m’a valu une réputation de femme de caractère. Cette exigence, je l’avais aussi pour moi-même. 

En Guadeloupe, tout le monde s’attendait à ce que je pleure. Mais cela n’est arrivé qu’une fois, lors de la soirée organisée par mes équipes


Être présente lors des sélections en Guadeloupe, puis à l’élection à Châteauroux, le 17 décembre, a-t-il été difficile pour vous, émotionnellement ? 
En Guadeloupe, tout le monde s’attendait à ce que je pleure. Mais cela n’est arrivé qu’une fois, lors de la soirée organisée par mes équipes. C’est évidemment un peu bizarre de se retrouver spectatrice de ce que tu as mis en place avec tes partenaires. J’y suis allée pour les remercier, et passer le flambeau à Cindy Fabre, le plus discrètement possible. Au temps de mon élection, nous n’avions pas les moyens de payer des places à 1 000 francs pour que tout le monde assiste à la finale. Seule ma mère avait pu venir, et mes deux sœurs m’en ont longtemps voulu de les avoir privées de cette victoire. Pour mon départ, toutes étaient là à Châteauroux, avec mon mari, nos trois enfants, et je me suis laissé submerger par l’émotion au moment de les remercier. Toutes ces fêtes, ces anniversaires, ces vacances où je les ai rejoints au dernier moment et que j’ai manqués parfois ou passés pendue au téléphone à régler des problèmes de Miss… Ils ont fait beaucoup de sacrifices pour me laisser exercer ma passion, tout en m’offrant d’être une épouse et une maman épanouie. Au fond, je pense qu’ils savent que je serais incapable d’exceller comme femme au foyer ! 

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