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Cailee Spaeny et Jacob Elordi jouent Priscilla et Elvis Presley dans le biopic de Sofia Coppola sur la femme du King.
CINÉMA - Les filles Lisbon de Virgin Suicide, Scarlett Johansson à Tokyo dans Lost in translation, sa Marie-Antoinette rock’n’roll ou encore la jeune Cleo au Château Marmont dans Somewhere... les héroïnes de Sofia Coppola ont toutes un point commun : leur solitude et leur ennui au milieu du chaos de leur vie. Pas étonnant, donc, que la réalisatrice américaine se soit emparée d’Elvis et moi, les mémoires de Priscilla Beaulieu Presley, pour les adapter à l’écran.
Priscilla, sorti au cinéma ce mercredi 3 janvier, raconte la vie de la femme d’Elvis Presley, de leur rencontre, alors qu’elle n’avait que 14 ans et lui 24, à leur divorce. Là où Elvis, le biopic de Baz Luhrmann, résumait une décennie de relation dans un montage d’une minute, Sofia Coppola accorde à la femme du King sa part de lumière, et révèle l’obscurité de ce dernier.
Le film débute comme un conte de fées. La jeune Priscilla Beaulieu (Cailee Spaeny) s’ennuie à mourir à Bad Nauheim en Allemagne, où son beau-père, un officier de l’US Air force, a été muté. Jusqu’au jour où elle rencontre Elvis Presley, qui fait son service militaire. Le célèbre chanteur, joué par Jacob Elordi, vient de perdre sa mère et a le mal du pays. Malgré leurs dix ans d’écart, il trouve en Priscilla une épaule pour pleurer et entame une relation avec elle.
Sofia Coppola encapsule à la perfection la naiveté et la douceur des premiers émois. La Priscilla adolescente est sur un petit nuage, puis a le cœur brisé lorsqu’Elvis rentre aux États-Unis. Il l’invite une première fois à Graceland, où il lui donne des somnifères qui la feront dormir pendant deux jours. Puis, malgré les réticences de sa mère et son beau-père restés en Allemagne, Priscilla emménage définitivement dans la maison du King alors qu’elle n’est qu’une lycéenne.
Quand le rêve vire au cauchemar
Très rapidement, sous la caméra de la réalisatrice, Graceland apparaît comme une maison de poupée, et Priscilla comme la femme-objet d’Elvis. Il choisit ses habits, jusqu’aux couleurs et motifs qu’elle a le droit de porter. Elle teint ses cheveux en noir et ne sort plus sans un trait d’eye-liner, parce qu’il le lui a ordonné. Constamment en tournage à l’autre bout du pays, seul le King décide quand elle a le droit de venir lui rendre visite (souvent pour ne pas qu’elle rencontre ses maîtresses).
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Pour la jeune Priscilla, Graceland, la maison d’Elvis à Memphis, se transforme en prison dorée.
Seule dans l’immense résidence de Memphis, l’adolescente déambule dans les pièces vides comme dans un musée. Le film alterne entre des scènes lentes et mélancoliques, comme pour forcer et le spectateur à s’ennuyer lui aussi, et des séquences bruyantes et festives où Elvis emmène Priscilla à Las Vegas et qu’elle découvre la drogue, rares moments d’euphorie dans une existence anesthésiée.
De retour à Graceland, c’est depuis l’extérieur que Sofia Coppola filme cette fois Priscilla. Derrière le cadran de la fenêtre semblable à des barreaux, elle devient prisonnière d’une vie rêvée et commence à déchanter.
Elvis Presley : un Roi tout-puissant
Car s’il est le roi du rock’n’roll et l’idole des Américaines, Elvis Presley est surtout un homme toxique. Sous couvert de bonnes intentions, il la possède : sa virginité est « sacrée » et c’est à lui de décider quand elle la perdra. Priscilla tombe enceinte peu de temps après leur mariage et sa première fois. Là encore, son corps n’est pas son choix : Elvis veut un bébé, elle doit le garder.
Des mois après la naissance de leur fille, Lisa Marie Presley, il refuse de la toucher malgré ses demandes, pour ne pas « lui faire de mal ». Pendant sa brève appartenance à une secte, Elvis se plonge dans les livres religieux et refuse de nouveau tout rapport sexuel. Pour avoir osé exprimer son envie, il la traite d’hystérique et lui fait un sermon sur le fait de « contrôler ses désirs pour ne pas qu’ils nous contrôlent ».
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Jacob Elordi fascine et terrorise dans la peau d’un Elvis possessif et violent.
Sofia Coppola met en scène une facette méconnue d’un homme surmédiatisé. Comme Priscilla l’expliquait dans ses mémoires, Elvis Presley était obsédé par la virilité. Sa femme devait être fragile, docile, et ne surtout pas frapper plus fort que lui à la bataille d’oreiller. Le film montre l’escalade dans la violence, verbale puis physique, au fur et à mesure que sa popularité explose et que leur couple décline.
« Priscilla » est aussi un récit d’émancipation
À la fin de leur relation, Elvis est au sommet de sa carrière, en résidence à Las Vegas. Dans le film de Baz Luhmann, quand Priscilla le quitte, il passe pour une victime, exploité par le Colonel, bourré de médicaments et délaissé par sa femme. La version de Sofia Coppola provoque nettement moins d’empathie : on ne le voit briller sur scène que quelques secondes avant de le retrouver ivre mort dans sa chambre d’hôtel, où il tente de forcer Priscilla à avoir un rapport.
Le film ne montre pas en entier l’agression sexuelle racontée dans le livre. Mais l’évènement est illustré notamment avec une phrase d’Elvis figurant dans les mémoires de sa femme : « Je vais te montrer ce que c’est d’être un vrai homme qui fait l’amour à sa femme ». Après treize ans sous le joug du Roi, Priscilla reprend le contrôle et demande le divorce avec ces mots : « Je te quitte pour avoir ma propre vie ».
Sofia Coppola n’efface pas l’amour entre Elvis et sa femme, et ne fait pas non plus de lui un monstre. En s’intéressant au point de vue de Priscilla, le film raconte surtout l’émancipation d’une jeune fille qui perd son innocence et comprend que l’amour et la célébrité n’excusent pas tout. Lorsque Priscilla quitte Graceland, elle est devenue une femme. Enfin libre.
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Cailee Spaeny et Jacob Elordi jouent Priscilla et Elvis Presley dans le biopic de Sofia Coppola sur la femme du King.
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Priscilla, sorti au cinéma ce mercredi 3 janvier, raconte la vie de la femme d’Elvis Presley, de leur rencontre, alors qu’elle n’avait que 14 ans et lui 24, à leur divorce. Là où Elvis, le biopic de Baz Luhrmann, résumait une décennie de relation dans un montage d’une minute, Sofia Coppola accorde à la femme du King sa part de lumière, et révèle l’obscurité de ce dernier.
Le film débute comme un conte de fées. La jeune Priscilla Beaulieu (Cailee Spaeny) s’ennuie à mourir à Bad Nauheim en Allemagne, où son beau-père, un officier de l’US Air force, a été muté. Jusqu’au jour où elle rencontre Elvis Presley, qui fait son service militaire. Le célèbre chanteur, joué par Jacob Elordi, vient de perdre sa mère et a le mal du pays. Malgré leurs dix ans d’écart, il trouve en Priscilla une épaule pour pleurer et entame une relation avec elle.
Sofia Coppola encapsule à la perfection la naiveté et la douceur des premiers émois. La Priscilla adolescente est sur un petit nuage, puis a le cœur brisé lorsqu’Elvis rentre aux États-Unis. Il l’invite une première fois à Graceland, où il lui donne des somnifères qui la feront dormir pendant deux jours. Puis, malgré les réticences de sa mère et son beau-père restés en Allemagne, Priscilla emménage définitivement dans la maison du King alors qu’elle n’est qu’une lycéenne.
Quand le rêve vire au cauchemar
Très rapidement, sous la caméra de la réalisatrice, Graceland apparaît comme une maison de poupée, et Priscilla comme la femme-objet d’Elvis. Il choisit ses habits, jusqu’aux couleurs et motifs qu’elle a le droit de porter. Elle teint ses cheveux en noir et ne sort plus sans un trait d’eye-liner, parce qu’il le lui a ordonné. Constamment en tournage à l’autre bout du pays, seul le King décide quand elle a le droit de venir lui rendre visite (souvent pour ne pas qu’elle rencontre ses maîtresses).
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Pour la jeune Priscilla, Graceland, la maison d’Elvis à Memphis, se transforme en prison dorée.
Seule dans l’immense résidence de Memphis, l’adolescente déambule dans les pièces vides comme dans un musée. Le film alterne entre des scènes lentes et mélancoliques, comme pour forcer et le spectateur à s’ennuyer lui aussi, et des séquences bruyantes et festives où Elvis emmène Priscilla à Las Vegas et qu’elle découvre la drogue, rares moments d’euphorie dans une existence anesthésiée.
De retour à Graceland, c’est depuis l’extérieur que Sofia Coppola filme cette fois Priscilla. Derrière le cadran de la fenêtre semblable à des barreaux, elle devient prisonnière d’une vie rêvée et commence à déchanter.
Elvis Presley : un Roi tout-puissant
Car s’il est le roi du rock’n’roll et l’idole des Américaines, Elvis Presley est surtout un homme toxique. Sous couvert de bonnes intentions, il la possède : sa virginité est « sacrée » et c’est à lui de décider quand elle la perdra. Priscilla tombe enceinte peu de temps après leur mariage et sa première fois. Là encore, son corps n’est pas son choix : Elvis veut un bébé, elle doit le garder.
Des mois après la naissance de leur fille, Lisa Marie Presley, il refuse de la toucher malgré ses demandes, pour ne pas « lui faire de mal ». Pendant sa brève appartenance à une secte, Elvis se plonge dans les livres religieux et refuse de nouveau tout rapport sexuel. Pour avoir osé exprimer son envie, il la traite d’hystérique et lui fait un sermon sur le fait de « contrôler ses désirs pour ne pas qu’ils nous contrôlent ».
A24
Jacob Elordi fascine et terrorise dans la peau d’un Elvis possessif et violent.
Sofia Coppola met en scène une facette méconnue d’un homme surmédiatisé. Comme Priscilla l’expliquait dans ses mémoires, Elvis Presley était obsédé par la virilité. Sa femme devait être fragile, docile, et ne surtout pas frapper plus fort que lui à la bataille d’oreiller. Le film montre l’escalade dans la violence, verbale puis physique, au fur et à mesure que sa popularité explose et que leur couple décline.
« Priscilla » est aussi un récit d’émancipation
À la fin de leur relation, Elvis est au sommet de sa carrière, en résidence à Las Vegas. Dans le film de Baz Luhmann, quand Priscilla le quitte, il passe pour une victime, exploité par le Colonel, bourré de médicaments et délaissé par sa femme. La version de Sofia Coppola provoque nettement moins d’empathie : on ne le voit briller sur scène que quelques secondes avant de le retrouver ivre mort dans sa chambre d’hôtel, où il tente de forcer Priscilla à avoir un rapport.
Le film ne montre pas en entier l’agression sexuelle racontée dans le livre. Mais l’évènement est illustré notamment avec une phrase d’Elvis figurant dans les mémoires de sa femme : « Je vais te montrer ce que c’est d’être un vrai homme qui fait l’amour à sa femme ». Après treize ans sous le joug du Roi, Priscilla reprend le contrôle et demande le divorce avec ces mots : « Je te quitte pour avoir ma propre vie ».
Sofia Coppola n’efface pas l’amour entre Elvis et sa femme, et ne fait pas non plus de lui un monstre. En s’intéressant au point de vue de Priscilla, le film raconte surtout l’émancipation d’une jeune fille qui perd son innocence et comprend que l’amour et la célébrité n’excusent pas tout. Lorsque Priscilla quitte Graceland, elle est devenue une femme. Enfin libre.
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